C’était un rendez-vous spirituel. Mais la 123e assemblée de la Conférence des évêques de Côte d’Ivoire a aussi servi de cadre à ces serviteurs de se prononcer sur la situation sociopolitique de leur pays. Ils ont exprimé leur inquiétude sur la vie de la nation.
La paix en Côte d’Ivoire, la réconciliation nationale, les élections locales, les rapports populations-politiciens…rien n’a échappé aux évêques de Côte d’Ivoire. À l’issue des cinq jours (du 31 mai au 4 juin 2023) qu’a duré leur rencontre et qui a abouti à la désignation de Mgr Marcelin Yao Kouadio comme nouveau président, ils ont passé au peigne fin la situation sociopolitique nationale. Pour eux, la vie de la nation ne rassure pas.
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« A qui profite la croissance économique tant chantée en chœur. L’économie ivoirienne serait l’une des plus performantes au monde dit-on. Quel monde, le monde réel ou le monde invisible ? Les populations sont attristées, nous assistons à une vraie paupérisation des zones rurales avec les produits agricoles mal rémunérés » a fait remarquer Mgr Marcelin Yao Kouadio lors de la messe de clôture de la 123e assemblée.
Pour le nouveau président de la Conférence des évêques de Côte d’Ivoire, l’église qu’il sert, a un devoir de vérité vis-à-vis de la société dans laquelle elle se trouve.
« (…) l’Eglise que nous avons, l’Esprit que nous avons reçu n’est pas un Esprit de peur, mais un Esprit de force, de vérité, et de courage. En plus, l’évangile n’est pas une idéologie mais parole de Dieu avec un pouvoir de libération. Oui l’espérance qui est en nous doit nous porter à briser les chaines de l’esclavage sous toutes ses formes. Mais un peuple asservi aux forces du mal peut-il accéder au salut sans passer par la conversion ? Il est temps que les Ivoiriens arrêtent de sacrifier aux divinités politiques qui sèment la mort et la désolation. Il y va de leur vie, présente et future », exhorte-il.
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Mgr Marcelin Yao Kouadio est encore plus critique dans son analyse de la vie politique nationale. Selon lui, l’appel à la paix et à la réconciliation n’a jamais été sincère. Parce que, dit-il, « la plupart du temps, ceux qui parlent de paix se promènent en gilet anti-balles ».
« On ne note aucun geste de remords chez les bourreaux, les Ivoiriens restent encore divisés, pourtant on nous a fait croire que les Ivoiriens vivent en bonne intelligence, dans quel quartier, dans quelle ville ? Oui les Ivoiriens restent encore divisés, le climat sociopolitique est suffocant le ministère de la Réconciliation. Le peuple est constamment humilié et pris en otage. Nous vivons une démocratie armée. Nous sommes en face d’un certain occultisme politique », se désole le nouveau président de la CECI.
S’agissant des élections locales qui arrivent, les évêques de Côte d’Ivoire tirent la sonnette d’alarme. L’ambiance qui prévaut avant les scrutins ne rassurent pas.
« Au nom de notre mission prophétique et interpellés par la situation de précampagne, dans les états-majors des différents partis politiques, nous appelons à des élections inclusives, paisibles, libres, transparentes et justes, crédibles et acceptées par tous. Au vu de l’histoire récente de notre pays, nous disons qu’aucun sacrifice n’est de trop pour la paix en Côte d’Ivoire. Pour cela, les institutions qui ont en charge le processus électoral doivent gagner la confiance des Ivoiriens en démontrant leur préparation et leur capacité à organiser les futures élections. De même, nous implorons tous les acteurs en charge des institutions électorales et judiciaires d’agir avec honneur, intégrité et honnêteté en dispensant une véritable justice », invite, la CECI dans son communiqué final.
Richard Yasseu