L’option militaire n’est toujours pas écartée. Contre les militaires au pouvoir au Niger, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) garde en bonne position sur la table son projet d’intervention armée pour rétablir l’ordre constitutionnel autour du président Mohamed Bazoum. Mais quel est le bilan de l’organisation sous-régionale en la matière ?
La Communauté économiques des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) a-t-elle déjà réinstallé des présidents déchus après un coup d’Etat ? Avec le projet de rétablir l’ordre constitutionnel au Niger, l’on est amené à jeter un regard sur le passé de l’organisation sous-régionale.
Ahmad Tejan Kabbah remis dans son fauteuil
Le premier cas a eu lieu au Sierra Leone. Ahmad Tejan Kabbah, le président d’alors a été évincé du pouvoir d’Etat le 25 mai 1997 par un coup d’Etat. Une coalition réunissant un secteur de l’armée sierra-léonaise et le RUF (rébellion), sous la direction du commandant Johnny Paul Koroma, avait pris le pouvoir. Les nouveaux maîtres de Freetown ne resteront au pouvoir que quelques mois. Ils seront chassés par l’ECOMOG, la force militaire de la CEDEAO. En mars 1998, Ahmad Tejan Kabbah retrouve son fauteuil.
La CEDEAO libère les autorités bissau-guinéennes
En 2012, une autre situation se présente à l’organisation sous-régionale. Cette fois-ci, c’est en Guinée Bissau. Des putschistes avaient mis aux arrêts Raimundo Pereira, le président par intérim de ce pays ainsi que le Premier ministre Carlos Gomes Junior. Bissau, la capitale était aux mains de l’armée qui contrôlait tout. Mais le sort va décider autrement pour les autorités encore aux mains des militaires au pouvoir. Sous une pression de la CEDEAO, les putschistes cèdent. Ils finissent par libérer le président intérimaire et le Premier ministre qui sont par la suite accueillis en Côte d’Ivoire.
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Mohamed Bazoum pourrait-il être le prochain chef d’Etat que l’organisation sous-régionale va remettre dans son fauteuil ?
« Je n’y crois pas », réagit Dr Sylvain N’Guessan, un analyste politique à l’Institut de stratégies d’Abidjan.
« Ceux qui ont fait le coup d’Etat au Niger, l’ont fait et c’est fini. Ils sont en train de faire des nominations. Pour eux, la page est tournée, il faut passer à autre chose. Maintenant, la question est de savoir s’ils vont permettre que monsieur Bazoum soit candidat à la future élection ? C’est une autre paire de manches. Mais je pense que le coup d’Etat est consommé. Quand des militaires arrivent à ce stade, ils mesurent les conséquences. Je ne crois pas qu’ils vont reculer », analyse-t-il pour 7info.
Selon l’expert ivoirien, un fait a milité en faveur de ces pays où l’action de la CEDEAO a payé. Il fait remarquer que dans ces Etats, il existait une pression interne venant soit de la société civile, soit des groupes armés opposés qui ont pesé. Ce qui semble ne pas être le cas au Niger.
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« Contrairement à cette fois-ci, il est vrai que ce ne sont pas tous les Nigériens qui applaudissent le coup d’Etat, mais il n’y a pas de pression interne. Au contraire, on voit que le peuple nigérien est en train de souder et de soutenir chaque jour la junte. Si cette pression interne n’existe pas, cela permet aux militaires d’être à l’aise. Ici, les Nigériens semblent apprécier ce qui s’est passé », conclut Dr Sylvain N’Guessan.
Richard Yasseu