Notre équipe de reportage quitte Bouaké, ce samedi 03 Août à 8h28mn, sous une pluie battante pour rejoindre la ville de Ouellé, au Centre-Est. La voie reliant Bouaké à M’bahiakro est praticable, bien bitumée. Après la commune de M’bahiakro, commence la misère. La route est impraticable. On ne parlera pas de nid de poule mais plutôt de gros trous qui parfois provoquent des crevaisons des roues ou des pannes de véhicules. 13h19mn, lorsque nous franchissons le corridor nord à l’entrée de la ville de Ouellé par le quartier Bayassou, sous un soleil de plomb. Quelques minutes plus tard, notre véhicule stationne à la gare qui est confondue au marché de la ville, au quartier Commerce, situé au centre-ville.
Ouellé est une localité urbaine située à 28 km de Daoukro, son chef-lieu de département, dans la région de l’Iffou et à 45 km de M’bahiakro. Ouellé a été érigée en sous-préfecture depuis le 06 septembre 1970. La circonscription de Ouellé a une superficie de 1558 km2 avec une population estimée à près de 40.000 âmes. C’est de la sous-préfecture de Ouellé que sont sorties celles d’Ananda, Ettrokro et Akpassanou. Mais, hélas, Ouellé demeure toujours une sous-préfecture de première classe.
Gros creuset du vivrier et faisant partie de l’ancienne boucle du cacao, cette ville accueille une population éclectique venue d’horizons divers. On y trouve de l’igname, du manioc, du riz, du tarot, de la banane, le piment, le gombo, les tomates, à profusion. Un aperçu des fruits des champs qui démontre que Ouellé est un réservoir de vivriers. L’absence totale d’infrastructures de base est criante à Ouellé, comme témoigne Koffi Kouamé, fils de la localité. << nous souffrons ici à Ouellé. Même pas une station service. La vente de carburant se fait au détail par des particuliers. Il n’existe pas de supermarché. Le bitume des rues qui date de 1973, se trouve dans un état de dégradation très avancée. Ouellé est un gros village et non une ville >> plante-t-il le décor de cette localité, en peine avec le développement.
Centre de santé agonisant, banque inexistante
Au centre de santé où une proche est internée pour une crise d’AVC, le constat est alarmant. Dame Kouamé Affoué, parente d’un patient soutient que << L’hôpital de la ville de Ouellé n’existe que de nom avec des bâtiments très dégradés. Cet hôpital, perdu dans une broussaille, lui servant de verdure, laisse une allure désolante. Les plafonds de la toiture pendent dans les salles de soins. Les malades souvent, se couchent à même le sol. Il n’y a pas de lit pour les malades avec un personnel insuffisant. L’ambulance est en panne depuis 2017 et attend patiemment les mécaniciens, sur des briques >>. Les soins de secours sont donc attendus pour ce centre hospitalier.
<< Pour des opérations bancaires, nous sommes obligés d’aller soit à Daoukro, soit à M’bahiakro ou même à Bouaké, pour dire qu’il n’existe même pas une seule Banque à Ouellé >>, fait savoir Dago Apollinaire, enseignant.
Un enseignant pour une école
Ouellé souffre de son école. Le mercredi 14 novembre 2018, lors de la double cérémonie de la rentrée académique et remise de kits scolaires, au lycée Adrien Kouassi Tollah, suivie de la remise de clef de la nouvelle école du village de Djédouabo, dans la sous-préfecture d’Ananda, organisée par le député Kra Paul et le président du conseil régional de l’Iffou, Traoré Adam Kolia, le visage de tristesse et de souffrance des enfants, femmes et enseignants a attiré notre attention. Ouellé a des écoles sans enseignants. Plusieurs écoles de la sous-préfecture de Ouellé sont construites en terre battue avec des toitures en paille. La grande désolation est celle du village de Kodia-essèkro avec un seul enseignant pour un établissement de 6 classes. Koukougnon Gnalé Brice, le seul enseignant de ce village raconte sa misère.
<< Je vis une situation très difficile car seul enseignant pour 6 classes. Je suis obligé de sacrifier certains enfants qui ont aussi droit à l’éducation. Pendant qu’on se retrouve avec deux enseignants dans une classe à Abidjan, je suis obligé de m’occuper des élèves de la classe de Cm2 parce qu’ils sont en classe d’examen et les autres je les occupe avec des exercices. Je demande au gouvernement de se pencher un peu sur le cas des enfants de cette zone qui ont aussi droit à l’éducation >> rappelle Koukougnon Brice.
Pas d’eau potable, gendarmerie sans véhicule de patrouille, orpailleurs « enceinteurs »
La sous-préfecture de Ouéllé n’a pas de cours d’eau, mais il existe de petits cours d’eau saisonniers, raconte dame Kouamé Akissi.
La nappe phréatique est insuffisante dans la zone. Ce qui rend difficile la fourniture d’eau potable aux populations. Le château d’eau qui alimente la ville et les villages environnants ne suffit plus, compte tenu de l’accroissement de la population. La population de cette belle cité, ne sait plus à quel saint se vouer. Les autorités qui doivent trouver la solution de la pénurie d’eau, n’ont pas encore tu leurs querelles intempestives pour faire face au développement de cette belle cité. Grâce à l’ONEP, un forage est ouvert sur l’axe Ouéllé- Sika-Komenankro pour alimenter la population.
Le phénomène des temps nouveaux qui est l’orpaillage clandestin, est devenu une problématique dans la région de l’Iffou en général et en particulier, dans la circonscription de Ouellé. << Ce phénomène a atteint une proportion très inquiétante. L’impact de ce phénomène est ressenti à plusieurs niveaux. L’on redoute d’éventuels tensions et conflits. Ces orpailleurs sont armés, on ne sait pour quelle raison. Il ne se passe pas un jour sans enregistrement de cas de vol, viol, braquage, coupure de route et de graves accidents mortels. Ces jeunes gens venus de la sous-région notamment du Mali, du Burkina Faso, du Niger et de la Guinée, entraînent les jeunes autochtones, au gain facile en s’adonnant à cette pratique illégale. Ces orpailleurs arrachent les femmes mariées, semant ainsi le désordre et des querelles dans les foyers. Les jeunes filles élèves ne sont pas restées en marge de la saga de ces orpailleurs. Ils enceintent ces jeunes élèves et les abandonnent à la charge des pauvres parents. Un chef de village est décédé à la suite d’un accident provoqué par un orpailleur. Des plantations détruites et les produits utilisés pour leur activités sont très toxiques pour la population. Ce phénomène d’orpaillage clandestin endeuille chaque jour des familles au vu et au su des autorités administratives et coutumières de la ville >> déplore Adama Koffi, enseignant.
La brigade de gendarmerie de Ouellé n’a pas de véhicule de patrouille. Selon Kouassi Yao, opérateur économique, << le Commandant de Brigade est obligé de louer un véhicule pour des patrouilles. Cette brigade couvre trois sous-préfectures >> dénonce-t-il. Cette ville de Ouéllé qui a vu naître le Vice-président de la République, Daniel Kablan Duncan, se meurt sans la main secourable de l’Etat.
Oscar de Ouellé, correspondance particulière pour 7info.ci