Me Emmanuel Altit, l’avocat de l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo a-t-il trahi un secret en indiquant dans sa demande de mise en liberté de son client, que ce dernier est empêché de participer à la présidentielle prochaine en Côte d’Ivoire ? Des observateurs de la scène politique ivoirienne jugent.
La défense de Laurent Gbagbo, l’ancien président ivoirien exige la fin de la restriction de liberté imposée à son client. Dans une requête formulée ce lundi 7 octobre aux juges de la Cour pénale internationale (CPI), Me Emmanuel Altit, le principal avocat explique sa démarche.
« Le maintien du régime restrictif de liberté aurait dans ce contexte pour conséquence d’interdire à Laurent Gbagbo de jouer un rôle dans la vie publique et dans la réconciliation de son pays. Cela lui interdirait par exemple de participer d’une manière ou d’une autre à l’élection présidentielle à venir. Il pourrait en effet, à la demande de responsables politiques du pays, être amené à participer à la campagne ou même, par hypothèse, à poser sa propre candidature », a développé l’avocat français.
Pour le Professeur Dago Pierre Godé, politologue et ancien directeur de l’Ecole des Sciences politiques à l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody, cette requête de Me Altit pourrait être tardive.
« Je me demande si leur requête n’arrive pas un peu tard. Ils ont eu tout le temps de faire cette demande. Maintenant, l’appel en droit est suspensif de la décision du tribunal qui est attaquée en premier ressort. Il faut se demander si leur requête ne vient pas un peu tard. Secundo, est ce que Gbagbo sera candidat en 2020 ? Pourquoi pas. C’est son droit. Mais pour qu’il le soit, il faut qu’il soit en liberté et que tous ses droits civiques et politiques soient reconnus. Tout ceci pour dire que la situation du président Gbagbo est trop complexe et doit être analysée à la fois au plan juridique et politique », introduit-il avant d’expliquer à 7info.ci que la présence de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire aura des conséquences positives sur la vie politique.
« Au plan juridique, poursuit le spécialiste ivoirien, il serait intéressant que cette requête repose sur des arguments de droit et non sur des considérations politiques. Parce que c’est une requête qui est devant un tribunal. Au-delà, c’est le souhait de tous les ivoiriens que le président Gbagbo rentre, et que s’il veut être candidat, qu’il le soit. Cela va éclaircir le jeu politique en Côte d’Ivoire, principalement au sein du FPI ».
Pour Professeur Dago Pierre Godé, la présence de l’ex-dirigeant ivoirien dans son pays mettra fin à la crise interne dans sa formation politique. « Son absence du territoire national alimente la crise au FPI. Chaque fois on entend «’’Gbagbo a dit’’. S’il est là, ce sera ‘’Gbagbo dit’’. On passera de ‘’Gbagbo a dit, à Gbagbo dit’’. En tout état de cause, tout dépend de la Cour pénale internationale car l’appel est toujours suspensif d’une décision. On attend donc ce décidera la Cour » analyse le politologue.
L’objectif de Me Altit, avocat de la défense est clair. Demander la levée de la restriction de liberté pour son client. Laurent Gbagbo pourrait ainsi rentrer en Côte d’Ivoire et participer à la vie politique de son pays. Les élections présidentielles de 2020 approchent à grands pas et l’on n’écarte pas la possibilité de voir l’ancien président se présenter. C’est d’ailleurs le souhait de ses partisans
Selon Traoré Mamadou un proche de Guillaume Soro, les avocats de Laurent Gbagbo, démontrent par cette requête, que leur client n’a pas encore pris sa retraite politique.
« Je ne vois pas la réaction des avocats de Laurent Gbagbo comme le fait de trahir un secret. Pour moi ils ne font que dire à tous que Gbagbo est un homme politique et qu’il le restera toujours » fait-il savoir à 7info.ci qui l’a joint.
La décision des juges de la CPI, qui était déjà attendue depuis l’appel de la procureure Fatou Bensouda, l’est encore plus, avec à la requête des avocats de la défense.
Éric Coulibaly
7info.ci