Le 18 septembre 2019, Alassane Ouattara, au soir de son deuxième mandat, lance les travaux de réhabilitation de la voirie de Yamoussoukro en décaissant 32,5 milliards FCFA. C’est ici que le chef de l’État qui a accédé au pouvoir suite la crise post-électorale de 2010, va surprendre plus d’un observateur sur une promesse de campagne en 2010.
Depuis la place Jean-Paul II de Yamoussoukro, le président ivoirien s’excuse publiquement devant les caméras du monde entier et les populations de Yamoussoukro.
« Lors de la campagne présidentielle de 2010, j’avais pris l’engagement de m’installer, dès mon élection, ici, à Yamoussoukro et de procéder au transfert effectif de la capitale. Malheureusement, l’état de délabrement dans lequel nous avons trouvé le pays ne nous a pas permis d’honorer cet engagement. Je voudrais m’en excuser », reconnaît Alassane Ouattara avec une humilité qui contraste avec les habitudes.
Ce manquement, le président ivoirien le justifie par des actions menées en urgence pour la reconstruction de son pays.
Pour Alassane Ouattara, cependant, son désir de donner à Yamoussoukro tous ses attributs de capitale politique n’a pas varié.
« Je voudrais cependant vous réaffirmer que ma vision est la même et que je suis fermement engagé à faire de Yamoussoukro, notre capitale politique, une ville moderne et modèle », conclut le président ivoirien.
À mi-mandat, le troisième que nombre d’experts politiques annoncent comme le dernier de ses quinquennats, quel est l’état des lieux en termes de réalisation et actions concrètes entreprises par Alassane Ouattara pour faire de Yamoussoukro une capitale moderne?
Pour joindre l’acte à la parole, plusieurs chantiers de réhabilitation des infrastructures routières, socio-économiques et éducatives ont été lancés dans la ville.
Environ 37 km de voirie revêtue et le bitumage de 4,4 km de routes en terre dans la ville sont concernés. Le gouvernement annonce plus de 133 milliards FCFA de travaux pour mettre en chantier la capitale politique jusqu’à fin 2025.
Objectif: offrir toutes les commodités à la ville et « redonner au District autonome de Yamoussoukro son lustre d’antan » avant le transfèrement effectif annoncé depuis douze ans, d’une capitale politique inachevée et endormie.
C’est ainsi que reprend vie le village natal du premier président de la Côte d’Ivoire, une ville un peu surréaliste, aux avenues immenses, peu fréquentées, qui s’interrompent brusquement pour céder la place à des pistes de latérite, ou à la brousse.
Institutions et ministères, organismes publics et privés
Née de la volonté du Père de la nation ivoirienne Félix Houphouët-Boigny, Yamoussoukro est une ville qui peine à remplir les fonctions d’une capitale politique.
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Soixante ans après l’indépendance, les habitants s’impatientent devant les promesses non-tenues, que se partagent les différents régimes qui se sont succédé depuis la mort d’Houphouët, en 1993.
Seuls le Sénat ivoirien et le siège de la chambre des rois et chefs traditionnels côtoient le majestueux dôme de la basilique Notre-Dame de la Paix, comme institutions nationales.
Aucun ministère, ni d’organisme national et international n’a jusque-là délocalisé ses bureaux dans la ville phare de la Région du Bélier. Même si Yamoussoukro a parfois eu droit à de rares Conseils des ministres pour rappeler aux populations que l’État tiendra un jour, si Dieu le veut, toutes ses promesses.
La Côte d’Ivoire figure parmi les pays pionniers en matière de transfert de capitale, puisque c’est en 1983 que la décision officielle fut prise de faire de Yamoussoukro, située au centre du pays, la capitale politique et administrative du pays, tandis qu’Abidjan, qui concentrait déjà 20% de la population ivoirienne, conservait son statut de capitale économique.
Entre 1971 et 1982, la future capitale a drainé l’essentiel du budget d’investissement du pays. Un plan d’urbanisation avec des tracés rectilignes prévoit la construction d’ouvrages monumentaux, rivalisant d’audace architecturale et technique.
À l’instar du choix d’Abuja au Nigeria pour désengorger Lagos, le choix de Yamoussoukro, situé à quelque 240 kilomètres d’Abidjan, visait à le décongestionner .
Si le stade de Yamoussoukro qui abritera en 2024, des matchs de la Coupe d’Afrique des nations (CAN), organisée par la Côte d’Ivoire, fait fière allure, le palais présidentiel, aujourd’hui silencieux, rappelle, en revanche, le temps où défilaient des chefs d’État, qui assistaient parfois au cérémonial du repas des crocodiles, en compagnie d’Houphouët-Boigny.
Eugène Sahi