Côte d’Ivoire

CPI- Détho Létho: « la bataille d’Abidjan était impossible…mais Dogbo Blé y tenait »

Mis à jour le 21 septembre 2018
Publié le 10/11/2017 à 5:47
Le général Détho Létho a déclaré à la CPI ce vendredi 10 novembre avoir fait remarquer au général Dogbo Blé au cours d’une rencontre en compagnie du général Philippe Mangou le 30 mars 2011, l’impossibilité de poursuivre les combats à Abidjan alors que l’ex-commandant de la garde républicaine tenait à continuer la bataille.
 
Interrogé par le magistrat Cuno Tarfuser, juge-président de la Cour qui voulait en savoir plus sur une rencontre que le témoin a eu en compagnie du chef d’état-major Philippe Mangou avec le général Dogbo Blé Bruno le 30 mars 2011, le général Détho Létho révèle avoir fait remarquer qu’il était impossible de poursuivre les combats à Abidjan. « Ce jour-là, le général (Ndlr, Philippe Mangou) avait convoqué une réunion. Beaucoup d’entre nous n’étaient pas arrivés. Il n’y avait que le général Nicolas Kouassi, moi-même et quelques éléments. Le général Kassaraté n’est pas venu. Le général Guiai Bi Poin n’était pas arrivé à l’état-major, le général Kodjo n’y était pas. Comme la réunion n’a pas eu lieu, le général  (Philippe Mangou) a voulu que je l’accompagne voir Dogbo Blé pour lui demander des munitions. Lorsque nous sommes arrivés, Dogbo Blé nous a reçus et le général (Philippe Mangou) a commencé à converser avec lui. Dans leur conversation, Dogbo Blé a dit qu’il tenait à faire la bataille d’Abidjan. C’est ce jour-là j’ai appris qu’il y avait une bataille à Abidjan », raconte Détho Létho.
 
Il ajoute que « J’ai pris la parole pour demander au général si je pouvais intervenir. J’ai demandé au général Dogbo Blé de quelle bataille il parle. Parce que militairement parlant,  »nous avions eu 600 Km pour arriver à Abidjan. Nous avions des éléments en avant-garde qui étaient situés sur la ligne de front, parce qu’il y a une ligne qui été tracée. Et depuis des jours, tous nos éléments qui étaient en avant-garde ont replié. Monsieur le président, pour nous militaires, quand vous devez sécuriser un lieu, on ne reste pas sur le lieu pour le sécuriser » a expliqué le témoin depuis Abidjan.
 
« Ce jour-là, je lui ai demandé comment il allait s’arranger pour faire la bataille d’Abidjan ? Parce que nous n’avions pas Abobo, nous n’avions pas Koumassi. On n’avait pas Adjamé. Yopougon dont il parle, je lui ai même posé la question ce jour-là de savoir que quand on parle de Yopougon il pense que Yopougon appartient aux Bété. Il y a combien de Bété qui ont construit à Yopougon ? Sur qui il compte à Yopougon ? Est-ce qu’il a déjà fait un recensement pour voir si tous ceux qui sont Yopougon sont plus nombreux que ceux qui sont de l’autre côté ? Nous n’avons pas la ville d’Abidjan en main.  »Moi je ne pense pas qu’on puisse engager un combat à Abidjan. Ce ne serait pas possible. On n’allait pas y arriver ». Il s’était énervé ce jour-là. Et je me souviens très bien qu’il a dit que je fais partie de ceux qui démoralisent les soldats, donc qui ne veulent pas qu’on continue la bataille d’Abidjan », poursuit l’ex-commandant des forces terrestres.
 
En retour, indique Détho Létho, « je lui ai dit qu’il était chef de corps et moi, j’étais un commandant d’armée. Moi je n’ai pas de contact particulier avec des soldats. Quand je dois parler à ma troupe, j’ai les chefs de bataillon ou tout au plus mon état-major. Ce n’est pas aux soldats que je parle. Je n’ai même pas de contact avec les soldats pour leur dire de ne pas participer aux combats d’Abidjan », conclut l’ex-commandant des Forces terrestres de l’armée de Côte d’Ivoire qui finissait par ailleurs sa déposition ce vendredi.
 
Laurent Gbagbo l’ex-dirigeant ivoirien et Charles Blé Goudé sont co-accusés de crimes contre l’humanité commis pendant la crise postélectorale qui a secoué la Côte d’Ivoire de 2010 à 2011. Il est le 66ème témoin dans ce procès.
 
Richard Yasseu
Source : rédaction Poleafrique.info  
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