Pour une seconde fois, le PDCI-RDA est convoqué devant la justice. L’initiative est encore des deux secrétaires de section qui avaient demandé et obtenu de la justice l’annulation du congrès extraordinaire du 16 décembre 2023. Quelles sont les implications de cette nouvelle saisine et que devrait faire le parti de feu le président Henri Konan Bédié ? Dr Eddie Guipié, enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo donne des éléments de réponse. Entretien !
Le PDCI-RDA qui a vu son congrès du 16 décembre 2023 être annulé par une décision de justice, vient encore d’être convoqué par la justice toujours pour le même sujet de la tenue du congrès extraordinaire. Comment est-ce que cela s’explique ?
D’abord d’un point de vue juridique, il s’agit de deux secrétaires de section qui sont congressistes de droit au regard des statuts du PDCI qui ont porté plainte contre leur parti. Ils estiment que le parti a violé ses propres textes en ne publiant pas la liste des congressistes avant le congrès. En procédure d’urgence qui est la procédure des référés, le juge a donc pris la décision de suspendre le congrès puisque celui-ci ne respectait les textes du PDCI, au regard de la décision du juge.
Le PDCI a pris acte de la décision et a convoqué un bureau politique. Dans le même temps, il y a une liste de congressistes qui a été publiée. On pense donc que ce parti semble avoir satisfait à la décision judiciaire pour être allé dans ce sens. Une nouvelle saisine du juge selon la même procédure a été faite cette fois-ci pour demander l’ajout de plus de 1000 membres du congrès qui n’auraient pas été sur la liste publiée par le parti. Nous attendons donc dans l’absolu la décision du juge saisi.
Quels sont les cas de figure qui se présentent avec cette nouvelle saisine de la justice ?
Il y a deux postures. La première serait que le juge reconnaisse le bien-fondé de la demande et demande en retour la suspension encore une fois du congrès. La deuxième hypothèse serait que, tout en reconnaissant le bien-fondé de la plainte, le juge ne suspende pas le congrès mais demande aux parties, rapidement avant le congrès, de publier la liste complémentaire. La troisième posture serait de rejeter la plainte de ces secrétaires généraux de section. Ce sont là quelque peu les scénarii qui se profilent à l’horizon.
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Si la première hypothèse est retenue, cela voudrait dire que le PDCI va être engagé dans un imbroglio judiciaire. Même si c’est le droit qui prime en toute chose, il faut quand-même s’interroger sur le fait que la plainte des deux secrétaires de section puisse paralyser un parti comme le PDCI-RDA. Le parti a-t-il exposé des failles juridiques ? Cela est possible. Dans tous les cas, ces dernières ont été bien récupérées par ces deux membres de ce parti.
Le PDCI-RDA est de loin le plus vieux parti de Côte d’Ivoire. Comment est-ce qu’on en arrive à cette situation avec la grande expérience de la gestion des hommes qu’il a ?
Il y a lieu effectivement de se poser cette question vue que les actes aient été motivés. Le fait aussi que le PDCI ait donné satisfaction à l’injonction du juge, montre qu’il était en défaut. Est-ce que la seconde plainte des plaignants est fondée, est-ce qu’il y a vraiment 1000 congressistes qui ont été retirés de la liste des congressistes ? On le saura dans quelques heures. Dans tous les cas, c’est ce qu’on pourrait qualifier d’inconfort juridique pour un parti qui existe depuis très longtemps. C’est quand-même dommage que selon la décision de la justice, cette formation politique ne se soit pas conformée à ses propres textes.
Le PDCI doit-il se remettre en cause à ce stade de sa vie ou doit-il tout reprendre en matière de processus électoral pour un congrès à organiser sans bruit ?
Il y a une date importante. Celle de la fin de l’intérim du président intérimaire. Je crois savoir que ce sera le 1er ou le 2 février 2024 qui sonnerait cette fin du mandat du président intérimaire. Peut-être que le bureau politique pourrait se réunir pour essayer de trouver une solution. Mais dans l’absolu, le parti pourrait tomber sous le coup d’une administration judiciaire. Il appartient donc au PDCI d’être vraiment vigilant.
Reprendre le processus électoral voudrait dire, rouvrir les candidatures, je suppose que c’est le fond de votre question. Pourquoi pas. Mais je pense qu’il y a eu un bureau politique qui a essayé d’aplanir les divergences entre les cadors du parti. Je pense que nous n’en sommes plus à ce niveau. Il s’agit d’organiser le congrès à proprement parler. Maintenant si le diable se réfugie dans les détails et qu’effectivement il y a des soucis, c’est le PDCI qui va en pâtir.
Réalisé au téléphone par Richard Yasseu