Le 24 mai 2022, le ministre de l’Économie et des Finances Adama Coulibaly annonçait le développement d’une politique de substitution du blé par certaines farines locales dans la confection du pain. Cela, au regard du cours international du blé qui enregistre depuis plusieurs mois une tendance à la hausse. La nouvelle suscite des inquiétudes chez les boulangers et pâtissiers de Côte d’Ivoire.
Le gouvernement ivoirien envisage la réduction de sa dépendance à la farine de blé. Du moins en ce qui concerne la fabrication du pain, un aliment consommé par 80% de la population en Côte d’Ivoire.
Selon les statistiques, 20% des importations de blé de la Côte d’Ivoire proviennent de l’Ukraine et 26% de ses importations d’engrais de Russie. Des transactions malheureusement mises à mal depuis l’éclatement de la crise militaire entre ces deux pays de l’Europe de l’Est.
Afin d’éviter que l’inflation du cours du blé à l’international n’ait un impact sur le prix de la baguette de pain en Côte d’Ivoire, le gouvernement a arrêté certaines mesures. La plus récente date du mercredi 4 mai 2022 au cours d’un conseil des ministres. A cette occasion, le conseil a adopté un projet d’ordonnance portant exonération du droit de douane sur les importations de blé, dans le cadre de la lutte contre la vie chère ainsi que son projet de loi de ratification.
« Compte tenu de la portée sociale du pain, aliment de base issu essentiellement de la farine de blé, cette mesure gèle, sur une période de trois (03) mois, à compter du 13 avril 2022, les droits de douane exigibles sur les importations de blé afin de maintenir le prix de cette denrée de première nécessité, tel que réglementé récemment, et de préserver ainsi le pouvoir d’achat du consommateur », précise l’ordonnance.
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Malheureusement l’idée d’une éventuelle substitution du blé par les farines locales dans la confection du pain, n’est pas du goût des principaux acteurs de la filière boulangère.
« Il y a eu une étude pour pouvoir incorporer les farines locales au pain, jusqu’à 15%. Pour l’heure cela n’a pas encore été appliqué. Ce qu’il faut savoir c’est que la farine de manioc coûte plus chère que la farine de blé. Donc cette décision est étonnante, vu que la farine de blé est plus compétitive que nos farines locales en termes de prix. Le sac de farine de blé se vend à 22 000 FCFA quand celui de farine de manioc se vend à 48 000 FCFA », explique à 7info, Amadou Coulibaly, le président de l’Association des boulangers et pâtissiers de Côte d’Ivoire.
Selon lui, si le pain est fabriqué avec les farines locales, la baguette sera plus chère, alors que depuis longtemps en Côte d’Ivoire il est difficile d’augmenter le prix de la baguette. « J’avoue que nous sommes sceptiques », s’inquiète-t-il.
Néanmoins, ce changement d’approche pourrait avoir certains avantages, s’il est bien structuré. D’une part, il favoriserait la promotion du consommer local et d’autre part l’accroissement de la chaîne de valeur pâtissière depuis les champs jusqu’à l’obtention des farines. Cela en passant par leur transformation et leur commercialisation, créant ainsi des milliers d’emplois pour les femmes et les jeunes.