Le code pénal actuel ne définit pas le viol. Ce qui laisse libre cours à diverses interprétations. Pour y remédier, des initiatives sont en cours. Ambiance.
« Les médecins requis pour l’examiner ont fait les constatations qui n’ont pas permis d’affirmer une relation sexuelle vaginale complète, sans exclure toute autre forme de rapprochement sexuel ».
C’est la conclusion du procureur qui a inculpé un suspect dans une affaire de présumée viol en septembre 2018 à Duekoué, dans l’ouest ivoirien.
Cette phrase est inscrite dans son communiqué, suite à une plainte pour viol sur mineure et des examens médicaux.
En attendant le procès, la sortie du procureur suscite dans le temps la polémique sur les réseaux sociaux. Ce fait divers relance le débat autour du viol. Si pour les uns, le constat des médecins n’établit pas le viol, pour les autres, l’attouchement sexuel n’est pas à écarter. En réalité, le viol n’est même pas défini dans le code pénal ivoirien.
Dans un rapport de 2016 sur les viols et leur répression en Côte d’Ivoire, la division des droits de l’homme de l’Onuci fait observer que
« la répression du viol est régie par le Code pénal (1981)26 qui, toutefois, n’en donne pas une définition. L’article 354 du Code pénal en énonce seulement les sanctions en précisant que le viol est puni d’un emprisonnement de cinq à 20 ans ».
La peine est celle de l’emprisonnement à vie si l’auteur : 1º est aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes ; 2º est le père ou un ascendant de la victime ou une personne ayant autorité sur elle, s’il est chargé de son éducation, de sa formation intellectuelle ou professionnelle.
Selon le rapport, l’article 354 du Code pénal ajoute que l’emprisonnement à vie s’applique également si la victime est mineure de 15 ans. Le Code pénal ne prévoit pas de sanctions pour d’autres crimes de violence sexuelle. Il est à noter en particulier que l’article 354 ne prévoit pas de sanctions pour le viol conjugal.
Dans un tel contexte d’absence de définition, toutes les interprétations ont libre cours. Pour y remédier, des initiatives sont annoncées dont la révision du code pénal et du code de procédure pénal.
Dans le rapport alternatif de la société civile ivoirienne sur les droits des femmes rédigé en juin 2018, le groupe de travail violences contre les femmes évoque cette initiative.
« La révision en cours prévoit de préciser la définition du viol et de la torture ». Par ailleurs, le groupe de travail note dans le document en cours d’élaboration, la non prise en compte de l’absence de résistance de la victime ainsi que la non prise en compte du viol conjugal dans la définition proposée du viol. Les activistes suggèrent d’impliquer la société civile pour une définition consensuelle du viol.
« Je pense qu’avec les plaidoyers jusqu’au jour de l’adoption des textes, la définition du viol pourra évoluer. En 2016, une circulaire ministérielle a été prise en ce sens. Il s’agit d’élargir la notion. Pour ce qui est du viol conjugal je demeure sceptique. Pour sa prise en compte, il faut un véritable changement de mentalité », commente un acteur du plaidoyer pour les droits de l’homme.
D’autres sources introduites saluent le texte en gestation.
« Le code de procédure pénale en révision a apporté de nombreuses autres innovations à la procédure pénale en général. On pourrait en parler, notamment la suppression de la cour d’assises. Ceci permettra de juger plus vite les faits qualifiés de crime, dont le viol ».
Le sujet du viol revient à l’occasion des 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre entamés le dimanche 25 novembre 2018.
Nesmon De Laure
Pôleafrique.info