Sport

Football, comment éradiquer le racisme dans les stades ?

Mis à jour le 23 mai 2023
Publié le 23/05/2023 à 4:00 , , , , ,
Des actes qui sabordent la beauté de ce sport. Le racisme refuse toujours de quitter les gradins des stades pendant des rencontres de football. Et c’est Vinicius Junior, l’attaquant brésilien du Réal Madrid qui en fait encore les frais sur la pelouse de Valence en Espagne. De quoi soulever l’indignation du monde du football.

En 2014, dans un match face à Villarreal, le brésilien Dani Alves, victime d’insultes racistes, avait répondu de la manière la plus inattendue. Le latéral droit brésilien a mangé une banane qui lui avait été jetée sur la pelouse. Le joueur a ensuite poursuivi la rencontre jusqu’à la victoire (5-2) de son équipe.

Mais pas de quoi décourager les racistes compulsifs. Le signal envoyé à Alves dans le championnat espagnol s’est estompé au fil des matchs. Les insultes racistes sont régulièrement perpétrées sur les stades en Europe sans que les coupables ne soient, dans la plupart des cas, sanctionnés. Et le phénomène n’est pas inhérent au vieux continent, mais plutôt au football en général.

« Le racisme, je l’ai vécu en tant que joueur et en tant qu’entraîneur. Nous l’avons vécu en Tunisie lorsque j’étais à l’équipe nationale junior et au Soudan en tant qu’entraîneur adjoint du Séwé Sport de San-Pedro. En ligue des champions en 2013, nous avions battu Al Hilal du Soudan au match aller des huitièmes de finale, ici à Abidjan sur le score de 4-1. Mais le retour au Soudan a été très difficile. Déjà à notre arrivée à l’aéroport de Khartoum, on nous a crachés dessus. Oui, de vraies salives nous sont tombées dessus. Et encore le jour du match, un vendredi, tous les spectateurs étaient en blanc et on a failli vivre une sorte de charia, car on a été lapidé sur la pelouse. C’est donc quelque chose que j’ai vécu, mais cela ne m’a pas poussé à abandonner ce sport bien au contraire », confie à 7info, Koffi Firmin, entraîneur de SOL FC d’Abobo, club de ligue 1 en Côte d’Ivoire.

Selon le technicien ivoirien, la meilleure façon de venir à bout du racisme dans les stades, c’est d’en parler en durcissant le ton. Plus les joueurs les mieux connus parleront, plus des sanctions sévères seront prises à l’endroit des racistes.

« Le fait d’en parler a suscité beaucoup de réactions à travers le monde et notamment en Europe. Je pense que c’est ce qu’il faut faire. Même si pour moi, ce sera difficile de l’éradiquer totalement parce que le racisme est plus une question culturelle qu’autre chose », a ajouté Koffi Firmin.

Guérir la société elle-même pour mettre fin au racisme

Le mal est profond. Et le monde semble impuissant face à un phénomène qui perdure malgré l’évolution des mentalités. Le racisme est ancré dans les mœurs. De l’avis du sociologue Yao Albert, enseignant-chercheur à l’université Lorougnon Guédé de Daloa, le racisme a gangréné la société en général.

« Le racisme dans le sport n’est que la partie visible de l’iceberg. En effet, le sport n’est qu’un pan de la société. C’est parce que nous avons le racisme dans la société occidentale de façon générale, que le racisme peut se retrouver au niveau du sport. Les personnes victimes de racisme dans le sport sont généralement les noirs. Cela tire ses origines du fait que depuis toujours, les noirs sont considérés comme des bêtes de foires. Vous conviendrez avec moi que des stéréotypes physiques persistent encore aujourd’hui : les Kényans et les Kényanes seraient doués pour la course de fond, les Noirs seraient les meilleurs sprinters et les personnes menues originaires d’Asie seraient prédestinées pour des disciplines sportives comme la gymnastique artistique. Ce ‘’racisme positif’’ montre à quel point les idées racistes sont profondément ancrées dans la société », analyse pour 7info, le sociologue.

Les stéréotypes et autres idées préconçues sur la peau noire ne sont totalement pas élagués. Pour combattre le racisme, des actions fortes s’imposent pour retourner les mentalités d’une société encore prisonnière du passé. Le sociologue propose une approche plus générale.

« Si nous voulons combattre le racisme, cela doit se faire de façon générale et non spécifiquement au niveau du sport. Car, toutes les instances qui tentent de régler le problème du racisme, ont en commun le fait que différentes instances ont considéré le phénomène comme un simple problème lié au sport, au lieu d’en reconnaître la dimension sociale. On oublie ainsi que le sport est toujours un miroir de la société et que le racisme dans le sport ne peut pas être distingué des phénomènes qui se produisent dans la société », conclut le Dr Yao Albert.

Plusieurs joueurs et acteurs du football ont apporté leur soutien à Vinicius Junior. La Liga, obligée de réagir après ce énième cas de racisme dans son championnat, a viré les 6 arbitres commis à la VAR le jour de la rencontre Real Madrid-Valence. Mais une sanction jugée trop faible pour un fléau qui moisit tous les jours, le football.
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