Les faits se sont passés entre 2010 et 2011 au moment de la crise postélectorale. À cette époque, l’autorité du président Laurent Gbagbo était contestée. Les actes que posait donc son administration étaient considérés comme illégaux.
La crise politico-militaire battait son plein après le second tour des élections présidentielles de 2010. Laurent Gbagbo, déclaré perdant au profit de son adversaire Alassane Ouattara, par la Commission électorale indépendante (CEI), mais vainqueur selon le Conseil constitutionnel avait encore en main les moyens de l’État. Son administration gérait donc les affaires courantes du pays. Mais pas pour longtemps. Des difficultés vont se présenter à lui dès la première quinzaine du mois de décembre 2010.
Selon l’économiste togolais Kako Nubukpo (https://www.cairn.info/revue-l-economie-politique-2011-3-page-97.htm), Philippe-Henry Dacoury-Tabley, le gouverneur d’alors de la BCEAO a fait reporter sine die un conseil des ministres de l’UMOA qui était prévu à Lomé le 15 décembre 2010. La raison ? Il ne saurait choisir entre les deux délégations ivoiriennes annoncées à Lomé pour assister au conseil.
« Une telle déclaration fut jugée d’autant plus surprenante que la communauté internationale, les Nations unies, la CEDEAO et donc de facto l’UEMOA (dans la mesure où tous les chefs d’État de l’UEMOA siègent à la CEDEAO), avaient déclaré ne reconnaître comme légitime que le seul gouvernement nommé par Alassane Ouattara, Président élu de la Côte-d’Ivoire », fait savoir l’article de Kako Nubukpo titré « La crise ivoirienne et l’avenir de l’intégration économique et monétaire ouest-africaine ».
Le gouverneur Dacoury-Tabley est par la suite ‘’démis’’ de ses fonctions le 22 janvier 2011 à la Bamako au Mali, lors de la 15e conférence des chefs d’État de l’UEMOA. Il était soupçonné d’être peu enclin à appliquer la décision des autorités de l’Union, prise lors du conseil des ministres extraordinaire du 23 décembre 2010, de ne reconnaître que la seule signature de Ouattara et de ses ministres pour les opérations impliquant le Trésor ivoirien auprès de la BCEAO. Une démission que le camp Gbagbo ne reconnait pas dans une annonce deux jours plus tard.
Il « fait réquisitionner par l’armée ivoirienne, restée fidèle, l’agence principale de la BCEAO d’Abidjan, avec en prime la nomination d’un nouveau directeur national de la BCEAO pour la Côte-d’Ivoire, dépendant du ministre de l’Économie et des Finances ».
Selon Kako Nubukpo l’acte est perçu comme un viol inédit des statuts d’extra-territorialité et donc d’immunité de la BCEAO par le principal État membre de l’UEMOA. L’acte accrédite également la thèse d’une dégradation accélérée du consensus fondateur de la zone franc, à savoir laisser la monnaie CFA à l’écart des turbulences économico-politiques des États de la zone, rappelle-t-il.
Dans la foulée, des informations sur la volonté des autorités d’alors de nationaliser les établissements bancaires sur le territoire national prennent de l’ampleur. Il est aussi constaté dans la même période, la sortie d’une forte somme d’argent de la représentation locale de la BCEAO.
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Il s’agit du « transfert par le clan Gbagbo de dizaines de milliards de francs CFA de l’agence principale de la BCEAO d’Abidjan vers une destination inconnue », comme l’ouvrage du macroéconomique et homme politique togolais.