L’État de Côte d’Ivoire a organisé ce lundi 20 novembre le rapatriement de plusieurs migrants ivoiriens en provenance de la Libye. Après six mois de prison, d’enfer dans le désert libyen, ces derniers regagnent la mère patrie.
Ils étaient au nombre de 155. Des migrants ivoiriens volontaires, en provenance de la Libye, ont foulé ce lundi 20 novembre le tarmac de l’aéroport international Félix Houphouët Boigny. L’avion s’est posé aux alentours de 19h avec à son bord des hommes et des femmes, qui avaient tenté la périlleuse aventure de la traversée de la méditerranée vers l’Europe, sans succès. Prisonniers en Libye et sujets à toute forme de violence depuis plus de six mois, ils doivent leur salut au gouvernement ivoirien, qui a initié une opération de rapatriement volontaire de ses concitoyens, en situation difficile dans le pays. Selon Issiaka Konaté le Directeur général des ivoiriens de l’extérieur, la tâche ne fut pas simple.
« Nous avons rapatriés 155 personnes dont 89 femmes. Elles étaient pour la plupart en prison. Nous avons effectué plusieurs vols de rotation entre Zuara et Mitiga afin de tous les ramener dans un même lieu et les rapatrier. Selon notre ambassadeur en Libye, il y avait 595 personnes en situation difficile dans le pays. Nous avons pu ramener 155 et nous irons chercher 260 autres déjà ce mercredi. Avant cela nous nous avons réussi à ramener 1277 ivoiriens dans leur pays. Vous savez en Libye il n’y a pas de loi car ce pays n’est pas signataire de la convention de Genève. Les migrants sont donc réduits en esclavage. Une situation qui doit interpeller toute la communauté internationale. Et c’est depuis le 27 novembre 2015 que l’État de Côte d’Ivoire a démarré ces opérations de rapatriement » a t-il indiqué avant de préciser que ces migrants seront pris en charge afin de permettre leur réinsertion dans le tissu social.
« Il y aura plusieurs étapes pour leur prise en charge. La Côte d’Ivoire est éligible sur un projet de l’Union Européenne et donc nous allons faire le profilage des migrants pour connaître les motivations de départ et nous allons leur accorder un hébergement de courte durée. Avec l’appui de l’Organisation Internationale des Migrants (OIM) nous allons prendre en charge 750 migrants. Environ 2,7 millions d’euros ont été alloués par l’Union Européenne pour cela » a ajouté le Directeur général des ivoiriens de l’extérieur, Issiaka Konaté.
Qui mieux que celui qui a vécu l’enfer, pour l’expliquer. Le jeune Gnadou, migrant ivoirien désigné comme porte-parole par ses camarades, raconte.
« Je remercie mon pays la Côte d’Ivoire d’être allé me chercher. Je suis heureux de retrouver ma terre natale. Nous avons traversé des moments difficiles, nous avons broyé du noir et aujourd’hui on retrouve le salut. Comprenez une chose il y a la réalité et le rêve et ce sont deux choses différentes. Chacun d’entre nous ici a son histoire. La mienne est différente. Je travaillais en Tunisie car c’est là que je suis parti et on m’a dit qu’il y avait du boulot à la frontière avec la Libye. Je suis donc allé travailler. Des personnes armées sont venues nous prendre et je suis devenu un prisonnier. Vous savez là-bas, le noir vaut de l’or. Lorsque tu travailles en Libye tu peux tomber sur des groupes armés qui vont te kidnapper pour te remettre à un groupe terroriste appelé Hasma boys. C’est ce dernier, qui te revend en esclavage » a t-il raconté avant de révéler les exactions dont lui et ses camarades ont été l’objet.
« La Libye est une jungle. Chacun défend son territoire. Nous avons vu et nous sommes là. Il y a certaines personnes parmi nous qui ne savent même pas où dormir. Nous avons fait six mois dans des prisons où on ne voyait même pas le jour. Il y a des gens sur qui on a tiré, d’autres sont morts, et nos sœurs sont régulièrement violées en Libye. C’est un vrai désordre qui y règne » a t-il achevé.
Les autorités ivoiriennes continueront les opérations de rapatriement jusqu’à ramener tous les migrants ivoiriens en situation difficile en Libye, en Côte d’Ivoire. Mais selon le Directeur général des ivoiriens de l’extérieur, plusieurs d’entre eux refusent de rentrer à cause du regard des autres.
Éric Coulibaly
Source : Rédaction Poleafrique.info