Tout comme les scrutins présidentiels passés, le Kenya vit à nouveau une contestation des résultats donnés par sa commission électorale nationale. Pour des observateurs, cela ne rassure pas pour la stabilité du pays.
Tous les regards sont tournés vers le juge constitutionnel. Mais déjà des tensions naissent au Kenya après la proclamation des résultats provisoires de l’élection présidentielle de 2022. À l’origine, la contestation des résultats par le candidat Raila Odinga.
Le lundi 15 août 2022, la Commission électorale du pays avait déclaré vainqueur l’ex-Vice-président William Ruto avec 50,49% des voix contre 48,85% pour Raila Odinga. Mais arrivé en deuxième position, l’ancien Premier ministre a qualifié le lendemain mardi, de « parodie » les verdicts des urnes, tel qu’annoncé par l’organe chargé d’organiser les élections. Raila Odinga a également annoncé son intention d’intenter un recours devant les tribunaux pour contester les résultats donnés par la Commission électorale.
Depuis, la tension est palpable dans le pays. Ses partisans ne cessent de se mobiliser. L’on fait cas de manifestations violentes dans certains quartiers de Nairobi, la capitale. Des scènes qui rappellent un épisode de violence liées à des élections.
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Faut-il craindre encore une crise postélectorale au Kenya ? Pour Dr Geoffroy-Julien Kouao, un analyste politique et écrivain ivoirien, cela n’est pas exclure.
« Il faut craindre le pire au regard des rivalités politiques à relent ethnique. A l’observation, le cadre institutionnel des élections a failli. Les bagarres entre les membres de la commission électorale portent un discrédit irréfutable sur les résultats », analyse pour 7info.
Le lundi 15 août avant la proclamation des résultats, des informations annonçaient que quatre sur sept des membres de la Commission électorale s’étaient désolidarisés du verdict annoncé. Selon eux, le processus avait un « caractère opaque ».
Le Kenya a déjà enregistré plusieurs crises postélectorales dans son histoire. L’une des plus sanglantes est celle de 2007. A cette date, la contestation des résultats avait déclenché le pire conflit du pays. 1 100 personnes avaient perdu la vie dans les violences interethniques.
Pour Dr Eddie Guipé, un enseignant-chercheur en Sciences politiques à l’université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo au nord de la Côte d’Ivoire, les enjeux sont énormes dans ce scrutin, et cela pourrait conduire à des troubles.
« Effectivement il y a des risques, des craintes eu égard aux enjeux. Nous savons que l’un des candidats en l’occurrence Raila Odinga en est à sa cinquième défaite. Aujourd’hui il avait des chances importantes d’emporter le scrutin. Il avait en face un candidat qui appartenait à la coalition au pouvoir dont il s’est défait progressivement mais qui porte aussi l’aspiration d’une partie de la population. Les enjeux sont énormes. Et ce sont ces enjeux, qui, disputés par les acteurs eux-mêmes puissants, pourraient faire craindre une crise postélectorale », analyse l’universitaire ivoirien pour 7info.
Selon lui, tout dépendra de la manière dont les acteurs chargés de régler le contentieux électoral vont se comporter. « Les contestations électorales sont vieilles comme le monde. Mais le tout est de se demander quelle sera la conduite à tenir vis-à-vis de la Commission électorale qui est partagée.
La position du juge électoral qui va donner les chiffres définitifs après le contentieux, sera aussi déterminante. Car c’est après les déclarations de ces autorités que l’on pourra voir l’attitude des acteurs que sont les candidats. Vont-ils embrayer dans la décision qui sera prise par les autorités compétentes ou vont-ils s’en départir au risque de créer encore une autre crise ? la question reste ouverte », fait savoir Dr Eddie Guipié.