La campagne des législatives 2021 en Côte d’Ivoire s’est bien déroulée dans l’ensemble, malgré quelques incidents enregistrés ici et là. Violences, propos tribaux, intimidations… se sont à nouveau invités sur la scène politique.
À quelques heures du renouvellement des membres de l’Assemblée nationale, voici venue l’heure du bilan. Violence, intimidation et repli ethnique, alors qu’une charte de bonne conduite a été signée par des acteurs de la vie politique ivoirienne.
Adjamé, Yopougon, Koumassi, affrontements au menu
C’est la commune d’Adjamé au nord d’Abidjan qui a ouvert le bal des violences. Le dimanche 28 février, des jeunes armés de gourdins, d’objets contondants pour diverses raisons, ont déclenché une bagarre pour empêcher la tenue du meeting de lancement de la campagne des candidats du Rassemblement des houphouetistes pour la démocratie et la paix (RHDP).
Le lendemain, lundi 1er mars, un partisan de la coalition de l’opposition à Yopougon, précisément au quartier Wassakara, a été pris à partie par un groupe de jeunes armés de machettes, alors qu’il s’apprêtait à coller les affiches de campagne de ses candidats. Il a eu la vie sauve grâce à des militants du RHDP qui l’ont rapidement extirpé des mains de ces voyous.
À Koumassi, le 2 mars, un conflit d’autant surprenant entre deux personnalités de la même liste, celle du RHDP a éclaté au grand jour. En effet, les partisans de Cissé Bacongo soupçonnent Adjaratou Traoré, députée sortante, de soutenir un candidat indépendant contre la liste RHDP. Des affrontements ont éclaté entre les deux camps à la place Inch’Allah, lorsque le camp Adjaratou Traoré est allé occuper l’espace. Des éléments de la police municipale et des partisans de Cissé Bacongo se sont rendus sur les lieux pour démanteler les installations. Il n’en fallait pas plus pour qu’éclate une bagarre entre les différents groupes.
Les propos tribaux de Lida Kouassi et Odette Lorougnon
Dans une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, Moïse Lida Kouassi, cadre du FPI, lors d’un meeting à Lakota, sa ville natale, a soutenu que seuls les filles et fils de la région doivent être élus pour représenter les populations Dida à l’Assemblée nationale.
« Ici c’est Lakota. Ici un Kouyaté Abdoulaye (député sortant) n’a pas de pédigrée. Il faut que ce soit clair. L’Assemblée nationale est faite pour que chaque groupe sociologique soit représenté. Donc il faut que les Dida soient représentés. Pour que les Dida soient représentés, ils n’ont pas besoin de Kouyaté Abdoulaye. Au nom de quoi ils vont nous apporter quelqu’un d’ailleurs pour que ce soit lui qui parle en notre nom ». Tels ont été les propos tenus par l’ancien ministre de la Défense.
Embouchant la même trompette, Odette Lorougnon, responsable des femmes du Front populaire ivoirien (FPI) face à des populations de Gagnoa a estimé que cette région doit impérativement revenir à sa formation politique. Car les autres partis ont »embrigadé » certaines régions de la Côte d’Ivoire.
« Alassane Ouattara a embrigadé le nord de la Côte d’Ivoire, notre pays, le septentrion ivoirien, il l’a embrigadé. Et puis, c’est le centre ouest, l’ouest et le sud qu’on vient partager. On laisse même le nord qu’on a embrigadé et on envoie ses candidats partout sur le territoire, et on se vante partout qu’on est un grand parti. Non, le Rassemblement des républicains (RDR, parti du président Ouattara devenu RHDP) … Nous avons demandé un poste seulement à Yamoussoukro (capitale politique), Laurent Gbagbo a dit donnez-moi un poste et que là où le PDCI est fort, qu’il y reste… Donc, laissez-moi (Odette Lorougnon) au moins à la sous-préfecture (Gagnoa). Ils (le PDCI) ont dit niet que Guikahué avec ces députés ne vont pas se retirer. Gbagbo a dit alors, on va s’affronter. C’est dans l’affrontement qu’on envoie votre fille (Odette Lorougnon) que vous avez fabriquée », a-t-elle expliqué à une foule de partisans venus l’écouter.
Intimidations et menaces
Laurentine Aguié-Koffi, candidate indépendante à Alépé, a renoncé à la compétition électorale après plusieurs semaines de menaces d’intimidations. Une première dans l’histoire politique de la course à l’hémicycle.
De son côté Jacques Ehouo, candidat aux législatives au Plateau, par ailleurs maire de la commune du Plateau, a vu son meeting de clôture être interdit. Alors qu’il avait déposé une demande en bonne et due forme et avait obtenu l’autorisation de manifester. Les supporters de Jacques Ehouo ont accusé le principal adversaire de leur champion, Ouattara Dramane dit OD, d’être responsable de cette interdiction. Chose que ce dernier a naturellement niée.
L’appel à l’apaisement et la paix lancé par le Premier ministre Hamed Bakayoko et le Médiateur de la République Adama Toungara semble être passé dans les oreilles de sourds. Et même si aucun incident majeur n’a été signalé, la vigilance reste de mise, afin d’éviter à la Côte d’Ivoire une autre crise postélectorale au soir du 6 mars 2021.