Sourire discret, une voix à peine audible, Olivier Tebily est un homme qui tente de passer inaperçu. Discret, mais pas furtif. Car rien n’y fait, il ne peut faire un pas dans la ville de Cognac sans qu’une personne ne l’interpelle, ne le salue chaleureusement ou ne traverse la rue pour l’approcher. Olivier Tebily n’est pas une rock star mais, à Cognac, il est connu et apprécié de tous. Nul ne tarit d’éloge à son égard. Ancien footballeur international, rien ne prédestinait cet ivoirien à la viticulture. Et pourtant… Rencontre avec un autodidacte éclairé, reconverti dans la vigne depuis trente ans.
C’est en parcourant les rues de Cognac, en cette chaude nuit d’été aux rythmes du festival « Cognac Blues Passion », qu’Olivier Tebily se remémore ses débuts. À ses côtés, marche l’Ambassadeur de Côte d’Ivoire en France, SEM Maurice Kouakou Bandaman. Olivier Tebily a invité le représentant de son pays à découvrir le festival, la ville de Cognac et surtout son exploitation viticole:
« C’était en 2008, un jour, j’ai déchiré mon contrat de footballeur professionnel alors qu’il me restait encore 3 ans et je me suis mis à mon compte. Je me suis acheté un établissement de café. C’était de 2009 et 2015 », se remémore -t-il. « J’ai repris ensuite un domaine viticole que j’ai développé. Depuis, l’aventure continue ».
La ville de Cognac compte 18 000 habitants. Les producteurs de cognac exportent 98% de leur produit dans le monde entier, essentiellement vers les États-Unis. Dans un environnement plutôt « clos », fait de traditions, de techniques qui se transmettent de générations en génération au sein des familles de producteurs, Olivier Tebily fait figure d’exception. Cet ancien footballeur international est l’un des tous premiers Africains à Cognac à posséder ses propres terres et à produire du cognac.
« Au départ, personne ne m’a pris au sérieux. Etant footballeur, les gens du coin ont cru que le cognac était seulement un hobby pour moi, que j’achetais des terres pour le fun et que je disparaîtrais rapidement. Mais c’était sans compter avec mon intérêt pour la viticulture. Je me suis accroché ». Ainsi se décrit Olivier à ses débuts.
Il a très tôt compris qu’il fallait préparer sa retraite de footballeur. En trente ans, il a réussi à imposer sa marque de Cognac « OT » sur les plus grandes tables françaises.
Et c’est à quelques kilomètres de la ville de Cognac qu’Olivier nous invite à découvrir son domaine viticole : des vignes à perte de vue qui, déjà, se gorgent de grappes de raisins. Olivier Tebily produit son cognac lui-même et supervise le processus de
transformation du début à la fin, c’est-à-dire de la distillation du vin, à sa transformation en cognac, jusqu’à sa commercialisation. L’ambassadeur Maurice Kouakou Bandaman s’est dit fier et heureux de venir soutenir Olivier Tebily, jusque dans sa région. Il représente un modèle pour les Ivoiriens : « C’est un exemple de réussite qui nous montre que les Ivoiriens peuvent réussir partout et dans tous les domaines », nous confie -t-il.
Parti avec deux hectares, Olivier en possède aujourd’hui trente, qu’il exploite avec son épouse. Il produit un cognac d’exception OT. Seul Africain producteur de cognac, il a séduit ses confrères de la région par son sérieux et son travail. Son souhait, à présent, est de se faire connaître en Afrique et plus précisément dans son pays d’origine, la Côte d’Ivoire.
Encore mal connu en Afrique, Olivier Tebily tente de profiter du fort engouement de la classe moyenne, au pouvoir d’achat croissant et à la recherche de produits de qualité, pour mieux faire connaître son cognac. S’il entend séduire le public africain par la qualité de ses flacons, il joue aussi sur la fibre continentale. Car Olivier Tebily est fier d’être celui qui seul évolue dans ce milieu fermé, les producteurs de Cognac, un milieu qui ne lui était pas forcément destiné. Surtout, il est fier d’avoir atteint un niveau d’excellence que certains peuvent lui envier.
Il invite les jeunes Africains à s’intéresser à ce secteur très prometteur. Lui-même a engagé sur son domaine un jeune Malien, qu’il a pris sous son aile et qu’il forme.
« Mes premières années, je les ai passées au contact d’un vigneron, Monsieur Jean- Michel Lépin. Il est mon mentor, il m’a fait confiance et m’a tout appris. J’ai travaillé gratuitement pour lui pendant trois ans pour apprendre. Il m’a permis d’utiliser ses outils sur ma petite exploitation car à l’époque, je n’en possédais pas. Je me suis découvert une passion pour la vigne et j’ai eu envie d’en faire plus. En 2010, j’ai sorti ma première bouteille de cognac sous le nom de « OT »: Olivier Tebily. Ne venant pas d’un milieu de vignerons, j’ai dû apprendre vite, très vite. Cette passion ne m’a plus jamais quitté. J’ai beaucoup lu, dégusté, pour me former le palais, regarder de bons vignerons travailler en cave, en distillerie et également écouter tous les conseils qui venaient à moi ».
Olivier a fait sienne cette belle ville de Cognac. Amoureux de Cognac, de son histoire et de son côté « tolérant », il se sent aujourd’hui pleinement Cogacain même s’il aspire à présent à produire de la liqueur distillée à base de vin de Palme. Les expériences, dans son laboratoire ont déjà commencé et donné une liqueur aux senteurs naturelles de truffe qui trouvera sans nul doute sa place dans les plus grands palais français et ailleurs dans le monde.
Fatim Camara, pour 7info.