Chercher une solution négociée ou rester campé sur sa position ? Les derniers développements de la tension entre le Mali et la Côte d’Ivoire interrogent sur l’issue que souhaite la junte.
Une rencontre déjà au Mali avec les autorités de la transition et une autre ensuite avec les dirigeants du pays également. Depuis le lundi 18 juillet 2022, le ministre des Affaires étrangères du Togo a fait une prise de contact d’abord avec Bamako puis Abidjan le lendemain 19 juillet. À la demande de la junte au pouvoir au Mali, le Togo entamait ainsi une médiation dans la tension entre la Côte d’Ivoire et le Mali.
Des premières rencontres, il ressort que Bamako et Abidjan sont disposés à une solution négociée du différend en cours entre ces deux capitales de l’Afrique de l’Ouest.
Serait-elle la voie privilégiée par la junte dans la résolution de la crise qui l’oppose à la Côte d’Ivoire ?
« Honnêtement je crois que la junte elle-même cherche une solution négociée dans cette question d’arrestation des militaires ivoiriens. Les arguments qu’elle a soulevés ici n’ont pas convaincu une bonne partie de l’opinion internationale et même nationale. Personne ne peut être convaincue que les gens qui sont arrivés par avion, 49 personnes peuvent intenter un coup d’État ou déstabiliser un pays. Les arguments que la junte a avancés jusqu’ici n’ont pas véritablement convaincu. Elle-même cherche aujourd’hui une solution négociée. C’est elle qui a sollicité la médiation du Togo. Et le ministre togolais des Affaires étrangères a fait un déplacement à Bamako et un déplacement à Abidjan. Je crois qu’on s’achemine plutôt vers une solution négociée avec la libération des militaires ivoiriens arrêtés et leur retour à Abidjan », analyse pour 7info, Seidik Abba, un journaliste-écrivain spécialiste des questions africaines.
Depuis le dimanche 10 juillet, 49 militaires ivoiriens ont été interpellés puis mis aux arrêts par les autorités maliennes. Il leur est reproché d’être des « mercenaires » comme le mentionne un communiqué lu à la télévision nationale du Mali quelques heures après leur arrestation. De son côté, Abidjan rejette l’accusation et soutient que ces soldats sont au Mali pour une rotation, la huitième du genre dans le cadre du National support element (NSE) qui se fait pour le compte de l’ONU représentée au Mali par la MINUSMA.
Avec l’initiative du Mali de faire intervenir le Togo dans la tension avec la Côte d’Ivoire, l’espoir d’un dénouement heureux de la situation est grand. Sauf que dans la foulée, Bamako a pris une autre décision. Jouer parallèlement la carte de la justice. Dans un communiqué, les autorités de la transition ont annoncé l’ouverture d’une procédure judiciaire contre les 49 militaires jusque-là en détention.
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Chercher une solution négociée ou rester campé sur sa position ? L’issue que souhaite la junte à cette crise est en question.
Pour l’analyste Seidick Abba la solution la mauvaise pour la junte et pour l’ensemble des deux pays est la voie de la négociation. À l’en croire, les militaires ivoiriens qui sont dans la Minusma tout comme ceux d’autres pays sont engagés pour soutenir le peuple malien. Et ce serait contre-productif que le peuple malien manifeste une certaine hostilité envers des gens qui sont allés défendre le territoire malien surtout dans le contexte actuel où la junte a l’urgence de la menace terroriste.
« Je pense que c’est derrière cette forme d’urgence (menace terroriste) que l’énergie de la junte malienne doit être mobilisée, et non la gestion d’événements comme ce qui concerne les militaires ivoiriens qui à mon avis n’auraient pas dû atteindre ce niveau puisque la MINUSMA a dit que c’était ses soldats et la Côte d’Ivoire a dit que c’était des soldats qui étaient envoyés pour la MINUSMA. Maintenant qu’il y a eu des erreurs de forme dans la formalisation, cela peut arriver, mais personne n’a été convaincu que ces gens sont arrivés pour faire un coup d’État ou déstabiliser le Mali. Et je crois que la junte a compris que plus on avance dans le traitement de ce dossier, moins elle pourrait fournir la preuve que ces gens sont venus faire un coup d’État. Et pour sa propre crédibilité, une solution négociée est meilleure qu’un mauvais procès », analyse l’expert africain.