Dans quelques heures, ce sera la fin de l’ultimatum de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), adressé à la junte nigérienne suite à la prise de pouvoir et la destitution du président Mohamed Bazoum. L’organisation sous-régionale va-t-elle mettre à exécution sa menace si les putschistes n’obtempèrent pas ?
Les contours d’une « éventuelle intervention militaire » contre les nouveaux maîtres de Niamey, au pouvoir depuis le mercredi 26 juillet 2023, semblent avoir été « définis ». Le vendredi 04 août 2023, après une réunion des chefs d’état-major des pays membres de la CEDEAO, le commissaire chargé des Affaires politiques et de sécurité, Abdel-Fatu Musah l’a déclaré à la presse.
“Tous les éléments d’une éventuelle intervention ont été élaborés lors de cette réunion, y compris les ressources nécessaires, mais aussi la manière et le moment où nous allons déployer la force“, a-t-il soutenu.
Le message est clair. Cependant, bon nombre d’observateurs ne croient pas que la CEDEAO soit capable d’intervenir militairement au Niger.
Pour Dr Gervais Boga Sako, un enseignant de droit à l’université Alassane Ouattara de Bouaké en Côte d’Ivoire, la CEDEAO ne peut agir sans l’aval d’autres organisations telle que l’ONU.
“Parlant de l’intervention militaire, de mon point de vue, cela reste un leurre. Parce que la CEDEAO ne peut pas se lever spontanément, pour intervenir militairement dans un État souverain. L’organisation ouest-africaine aura nécessairement besoin d’une résolution de l’ONU. Et la France qui souhaite le plus cette intervention en a conscience. Or, une telle résolution n’est pas très garantie, puisqu’il n’est pas évident d’obtenir l’accord de la Russie et de la Chine qui détiennent aussi le droit de véto“, explique-t-il.
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Et de préciser que : “De toute évidence, l’intervention envisagée par les Chefs d’Etats risquerait d’embraser toute la sous-région de l’Afrique de l’Ouest. Parce que ne perdons pas de vue que les États déjà dirigés dans les mêmes conditions par des militaires marquent leur solidarité et soutien aux putschistes nigériens. Sans négliger la présence quasi visible de la Russie qui parraine ces pouvoirs militaires“.
Pierre Koné, diplômé en science politique de l’université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan Cocody, est du même avis.
“Toutes ces déclarations de la CEDEAO, c’est juste de l’intimidation. Elle n’a pas la capacité d’attaquer le Niger. Si elle est intervenue en Sierra Leone pour dégager le président Johnny Paul Koroma, et bien c’est parce qu’il était seul. Idem pour Yaya Jammeh de la Gambie. Or le cas nigérien est différent. Ce pays n’est pas seul. Il a le soutien du Mali, du Burkina Faso, de la Guinée, de la Mauritanie et de l’Algérie. Les pays de la CEDEAO qui prendraient le risque d’attaquer le Niger seront eux-mêmes attaqués », analyse-t-il pour 7info.
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Pour rappel, la dernière intervention militaire des forces de la CEDEAO remonte à 2017, lorsque le président gambien Yahya Jammeh avait refusé de reconnaître la victoire de son adversaire Adama Barro lors de la présidentielle de 2016.