Quel bilan politique peut-on faire de la marche de l’opposition contre la nouvelle candidature d’Alassane Ouattara aux prochaines élections ? Après les troubles, retour au calme. La manifestation n’a pas eu l’effet attendu. Ouattara maintient sa candidature devant des opposants mal organisés.
Les partis politiques de l’opposition ont-ils pissé dans le violon en organisant cette marche de protestation contre un nouveau mandat d’Alassane Ouattara ? Le bilan dressé fait état de 5 morts, 104 blessés et des dégâts matériels mais sans aucun incident sur la décision du Chef de l’Etat de briguer à nouveau la magistrature suprême. Le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP) prépare même l’investiture de son candidat le 22 août prochain, dans la sérénité. Une situation qui pose le problème du poids réel de l’opposition en Côte d’Ivoire.
Selon le politologue, Dr Kipré Paul, enseignant-chercheur à l’Université Félix Houphouët Boigny, l’opposition ivoirienne n’a pas de projet politique réel.
« L’opposition, voilà déjà plusieurs années que certains membres de cette opposition parlaient déjà de transition politique. Ils disaient déjà à cette époque qu’il fallait une transition. Le président Bédié lui-même et ceux qui sont à l’étranger, l’ont dit. Pour vous dire qu’il n’ y a pas de réelle envie d’aller aux élections en fait. Si le président Bédié ne s’était pas désolidarisé, y aurait-il eu un semblant d’opposition ? La question est d’ailleurs posée » soutient le politologue.
Et de poursuivre, toujours s’interrogeant. « Il y en a-t-il seulement une ? »
Dr Kipré Paul estime que « L’opposition est d’accord sur une seule chose, une transition puis le départ du président Ouattara. Une revanche. Mais sachez que tous ces partis politiques sont eux-mêmes contestés en leur sein. Ont-ils un projet de société ? Ont-ils un bilan ? Un programme social ? Même le PDCI n’en a pas Pris individuellement, voilà ce que ça donne. Ensemble ils n’ont rien en commun. Ils essaient de se structurer pour une violence organisée. Une insurrection armée qui prendrait la forme d’une insurrection populaire car selon leur calcul une insurrection populaire serait légitime » analyse-t-il.
Les autorités ivoiriennes ont procédé à des arrestations après la marche de la semaine dernière. Pulchérie Edith Gbalet, présidente d’Alternative citoyenne ivoirienne (ACI) et deux de ses compagnons ont été interpellés puis entendus lundi 17 août. Plusieurs voix notamment des organisations de défense des droits de l’homme se sont élevées pour demander leur libération.
« Un raccourci, toujours des raccourcis. Les marches ne servent qu’à user les sandales, dans l’état actuel des choses. Ce modèle de contestation est pour un autre espace que la capitale et un autre parti que le PDCI. Car ce sont des marches violentes et non de démonstrations. Ces marches ne font pas passer de messages. Si démonstration pacifique il y avait, elles seraient plus productives. Si l’opposition veut faire passer des messages, je leur suggère de procéder par négociation et non par la force. L’enjeu serait de demander au président d’aider à un renouvellement de la classe politique, à un changement de génération, je voulais dire. Pour résumer, l’opposition ne travaille pas et recherche toujours des raccourcis. Il n’y a pas de véritable acteur car pas de leader qui se dégage de cette opposition, pas d’acteur pas d’objectif dans un contexte flou; il n’y a donc pas d’enjeu » soutient Dr Kipré Paul.
Eric Coulibaly