Le décret pris en décembre 2021 est signé du président ivoirien Alassane Ouattara. Son contenu publié sur les réseaux sociaux suscite des inquiétudes.
Le texte prévoit les cas où l’acquéreur d’une parcelle de terre peut se voir exproprier de son bien, après deux ans sans mise en valeur. Sur les réseaux sociaux, les commentaires vont bon train. Il ressort des différentes réactions une réelle crainte. « Si cette loi devait être appliquée dans son entièreté, les gens qui se débrouillent ne pourront jamais construire », s’inquiète un internaute. « J’ai épargné durant 10 ans pour m’acheter le terrain, il me faut encore du temps pour le mettre en valeur. Ou bien le pauvre n’a pas droit de se bâtir un toit. Avec ces maigres revenus, on presse les gens à construire dans un court délai », renchérit un autre. Et un autre de de suggérer, « dans ce cas que les plans de lotissement des parcelles soient vite approuvés et qu’on facilite aussi l’obtention des ACD ».
Dans son chapitre I portant Dispositions générales, le décret du 8 décembre 2021 présente en son article 1 premier alinéa, les actes administratifs concernés par la déchéance. Il s’agit des actes administratifs ayant conféré des droits d’attribution ou de concession provisoire. À savoir les arrêtés de concession provisoire et les lettres d’attribution. En son article 2, ce décret précise que « sont considérés comme non mis en valeur, les terrains urbains du domaine privé de l’État sur lesquels aucune construction n’est érigée au-delà du délai imparti à cet effet par l’acte administratif conférant des droits au bénéficiaire ». Dans son article 3, le même texte indique que : « sont considérés comme insuffisamment mis en valeur, les terrains urbains du domaine privé de l’Etat dont les constructions sont inachevées. Il s’agit notamment : des chantiers de bâtiments inachevés et laissés à l’abandon, des terrains faisant uniquement l’objet de clôtures, des terrains sur lesquels l’édifice principal, objet du permis de construire n’est pas bâti, des terrains abritant des constructions en matériaux précaires ».
Faut-il avoir peur avec ce décret ? Non, estime Siriki Sangaré, le président Chambre nationale des promoteurs et constructeurs agréés de Côte d’Ivoire (CNPC-CI). Il explique pour 7info. « Il s’agit ici des terrains qui sont propriété privée de l’Etat. Le problème c’est qu’il se rend compte qu’il y a certaines personnes qui ont des terrains et qui n’ont pas d’arrêté de construction définitive (ACD). Ils possèdent seulement des arrêtés de construction provisoire (ACP), des lettres d’attributions. Or, il est clairement mentionné que celui qui a un ACP doit forcément mettre son terrain en valeur. Si ce n’est pas fait et qu’il n’a pas d’ACD, l’Etat est en droit de récupérer le terrain et l’attribuer à quelqu’un d’autre pour le mettre en valeur. C’est pareil pour les lettres d’attribution », explique-t-il.
« Imaginez qu’un quartier soumis à un plan de développement urbain se retrouve avec des personnes qui ont des terrains avec des ACP et les terrains ne sont pas mis en valeur. C’est pour clarifier tout cela que l’Etat a pris ces mesures », précise Siriki Sangaré.
Pour ce qui concerne les particuliers détenteurs d’une attestation villageoise comme seul document de leur bien immeuble, le président Chambre nationale des promoteurs et constructeurs agréés de Côte d’Ivoire fait un éclaircissement. « On ne peut pas parler d’expropriation dans ces conditions, dans la mesure où ils ne sont pas propriétaires. Lorsqu’un particulier paye pour un terrain villageois, il faut faire les démarches pour obtenir un ACD. Cet arrêté de construction définitive le contraint à mettre en valeur ce terrain dans un délai d’un an et cinq ans pour achever les travaux », fait-il savoir.
Pour finir, le président du (CNPC-CI) rappelle que si ces conditions ne sont pas remplies, en cas d’expropriation, aucune disposition ne prévoit l’indemnisation.