En Côte d’Ivoire, depuis le 30 avril, l’opération de ré-identification des puces de téléphones mobiles a pris fin. Mais, l’arrêt du processus suscite des grognes au sujet de la suspension de certains numéros de téléphones qui n’ont pu être identifiés, faute de pièce d’identité. Lesquels documents ne sont disponibles que depuis quelques semaines dans les locaux de l’Office national d’identité (ONI).
Roland K. est agent distributeur dans une entreprise commerciale de la place. Client d’une compagnie de téléphonie mobile en Côte d’Ivoire, il a aujourd’hui du mal à communiquer avec ses correspondants. La raison ? Son numéro est suspendu depuis la fin de l’opération de ré-identification des puces. A Poleafrique.info, il explique ce jeudi 17 mai, son désarroi. « Mon numéro a été suspendu parce que je ne l’ai pas fait identifier. Mais ce n’est pas ma faute car je n’ai jusque-là pas reçu de réponse à ma demande de renouvellement de CNI, que j’ai formulée depuis près d’un an », raconte-t-il remonté.
Roland K. a égaré sa carte nationale d’identité il y a plus d’un an. Comme le veut la procédure, il a formulé une demande de renouvellement de la carte. « Elle n’est jamais venue », dit-il. Pour lui, si la ré-identification est une opération de sécurité nationale, comme le disent les autorités, il n’est pas prudent de prendre la pièce d’identité d’un tiers pour se faire identifier comme le recommandent certaines maisons de téléphonie. Qu’advient-il si le vrai propriétaire du numéro ré-identifié commet par la suite des bévues alors que les autorités n’ont aucune information sur lui ? Il est certain, selon lui, que c’est celui au nom de qui l’identification est faite qui paiera les pots cassés.
Comme Roland K, de nombreuses personnes en Côte d’Ivoire sont dans la même situation. D’autres encore n’ont pu faire ré-identifier leur puce parce que certaines compagnies de téléphonie mobile exigeaient la présence physique des »parrains » (personnes qui prêtent sa carte d’identité). Ce qui n’était pas toujours évident. Par ailleurs, il est récurrent d’entendre des plaintes de clients de téléphonie mobile dont les numéros sont sous astreinte alors que leur puce ont été identifiés.
Le processus d’identification des puces de téléphones mobiles étaient à sa deuxième phase dans le pays. Il a été lancé fin septembre 2017 et devait durer 6 mois. Mais à la demande du chef de l’Etat ivoirien, un délai supplémentaire d’un mois avait été accordé aux retardataires pour s’achever le 30 avril 2018. Délai au-delà duquel avait prévenu le gouvernement, « les personnes non identifiées selon les exigences prescrites par le décret de cette 2ème phase d’identification, seront mises en restriction d’appel pendant une période de 2 mois. Et si après ces deux mois, ces personnes ne sont toujours pas identifiées, elles risquent conformément à la réglementation en vigueur, d’être tout simplement désactivées, leur numéro supprimé et sorties des registres des abonnés ».
Selon une formule palliative pour les »sans pièces » donnée par le gouvernement, il était possible de faire identifier sa puce à partir de la carte d’identité d’un proche ou tout autre personne souhaitée en attendant de faire la mutation plus tard.
Dans le pays, ce sont un peu plus 7 millions 900 000 cartes nationales d’identité qui ont été distribuées de 2008 au 30 avril 2018, a affirmé début mai, Diakalidia Konaté le directeur général de l’Office national d’identité (ONI). Courant mars, cette même structure annonçait dans un communiqué, la disponibilité de centaines de milliers de cartes d’identité des personnes enrôlées plus tôt. Mais, l’ONI invitait les requérants de cartes à procéder au retrait ce document administratif dans la période du 10 mai au 10 juin. Donc bien après le délai de rigueur pour la fin de l’opération de ré-identification des puces.
« Les cartes d’identité étant désormais disponibles, il serait bien que les autorités donnent une autre possibilité de faire ré-identifier les puces », propose Roland K.
Un autre souci, la population connectée mais analphabète des régions rurales. Dans les campements les plus reculés du pays, des personnes disposent de téléphones portables, même s’il n’y a pas une bonne couverture réseau. Souvent, dans les zones forestières, l’abonné grimpe à un arbre ou monte sur un monticule, bien déterminé pour capter un peu le réseau. Toutes ces personnes qui n’ont pu abandonner leurs travaux champêtres pour venir en ville se faire identifier n’ont pas été prises en compte. Les agents d’identification étant en des points fixes et avec l’exigence de la possession d’une carte nationale d’identité, document rare depuis plusieurs années en Côte d’Ivoire.
Richard Yasseu
Source : rédaction Poleafrique.info