Auront-ils eux-aussi droit à une revalorisation des salaires et à quel prix ? La question se pose pour les travailleurs du privé.
Des salaires revalorisés, la bonne nouvelle annoncée le 6 août 2022 par le président ivoirien Alassane Ouattara, est effective depuis la fin du même mois. Mais pas pour tous. Seuls les fonctionnaires et agents de l’Etat ont été concernés par ce changement pécuniaire. Les travailleurs du secteur privé, eux, sont encore dans l’attente. Ils s’inquiètent de ce que les bonus sur les salaires, dont ils ne sont pas concernés, pourraient occasionner au niveau du coût de la vie.
« Je vis dans un bâtiment de plusieurs maisons basses construites par un particulier. Depuis quelques jours, mes voisins disent avoir entendu le propriétaire exprimer son désir de revoir à la hausse les loyers de ces appartements. Selon eux, il s’appuie sur la revalorisation des salaires. Mais moi je ne suis pas concerné par ce bonus fait sur les salaires car je travaille dans le privé. Je ne sais que faire si cette intention est mise en application », s’inquiète K. Hyacinthe, un jeune cadre moyen dans une entreprise de commercialisation de biscuits importés.
Comme K. Hyacinthe, de nombreux travailleurs du secteur privé s’interrogent. L’espoir est-il permis pour eux ?
« Contrairement aux fonctionnaires, les travailleurs du privé reçoivent « un salaire », alors que les agents et fonctionnaires de l’Etat reçoivent « un traitement ».
Donc vous comprenez que le salaire d’un travailleur du privé va dépendre de la prospérité de l’entreprise elle-même. En somme, nous sommes dans une économie où le marché du travail existe d’une manière ou d’une autre, l’Etat ne peux pas intimider l’ordre à une entreprise de payer plus un travailleur », analyse pour 7info, Dr Roméo, un macro-économiste, modélisateur et chercheur à la cellule d’analyse de politiques économiques du Centre ivoirien de recherche économique et sociale (CIRES).
Selon l’expert ivoirien, l’espoir pour cette catégorie de travailleurs dépend de la rentabilité du secteur privé et de la régulation du marché du travail dont l’État a en charge. Pour ce qui est du prix à payer pour obtenir une amélioration du niveau de vie des travailleurs du privé, Dr Roméo Boyé ajoute qu’il faudrait que l’Etat crée un environnement propice aux affaires et assure la régulation du marché du travail de façon efficace.
Dans son discours du 6 août 2022, Alassane Ouattara, le président ivoirien exhortait également le patronat à reconsidérer le salaire minimum dans le privé, afin de préserver le pouvoir d’achat des populations. Sur la question, des observateurs rassurent que des discussions sont en cours.
« Concernant le secteur privé, il faut dire qu’il y a un cadre qui est déjà en place depuis longtemps entre l’Etat, les centrales syndicales et le patronat, pour régler les problèmes des travailleurs du privé. Dans son discours, le président a donné des pistes de revalorisation du SMIG qui va se faire en accord avec le patronat pour éviter que cela puisse créer des augmentations au niveau des produits. Donc il faut s’entendre avec le patronat pour ne pas que ce soit une charge pour les entrepreneurs du secteur privé. Des discussions sont en cours et comme je l’ai indiqué, il y a un cadre dans lequel l’Etat échange avec les travailleurs du privé au travers de leurs centrales syndicales, mais également avec les employeurs pour s’accorder sur des mesures pour ces travailleurs du privé », fait savoir Jean-Yves Abonga, le président de l’Intersyndicale des fonctionnaires de Côte d’Ivoire (IFCI).
Selon le responsable syndical, la priorité a été mise en premier lieu sur le cas des travailleurs de l’administration publique. Mais il rassure que de bonnes nouvelles sont en cours pour ceux du privé.
« Nous nous sommes inscrits d’abord dans un dialogue pour le secteur public. Mais je pense que ce dialogue va s’instaurer aussi au niveau du privé. Et c’est par la suite qu’on pourra espérer des revalorisations pour les travailleurs du privé. Il y a un cadre dédié pour cela. Le chef de l’Etat a demandé que ce soit fait au plus tard fin décembre 2022 pour que des mesures soient prises. Nous espérons donc que ces rencontres auront lieu rapidement pour que de très bonnes nouvelles soient annoncées aux travailleurs du privé », fait savoir Jean-Yves Abonga.
Pour les fonctionnaires, le président ivoirien a décidé d’augmenter de 20 000 FCFA par mois, l’indemnité contributive au logement. La prime mensuelle de transport est désormais de 20 000 FCFA pour les fonctionnaires et agents de l’État qui résident dans le District d’Abidjan et 15 000 FCFA pour ceux résidant à Bouaké, contre 7 000 FCFA avant. Pour les fonctionnaires et agents de l’État dans les autres chefs-lieux de région, cette prime est passée à 15 000 FCFA contre 5 000 FCFA, tandis que tous les autres fonctionnaires et agents de l’État qui résident dans les autres localités percevront dorénavant 10 000 FCFA, contre 5000 FCFA avant. L’allocation familiale passe maintenant de 2 500 FCFA à 7 500 FCFA par mois et par enfant. Enfin les fonctionnaires et agents de l’Etat ont droit à une nouvelle prime dite ‘’Prime Ado’’ instaurée chaque fin d’année. Elle représente un tiers (1/3) du salaire mensuel indiciaire de base du mois de décembre, qui sera payée au début du mois de janvier.