Comment s’est fait le choix des témoins dans le procès Laurent Gbagbo et Blé Goudé et comment s’explique les témoignages tendant à blanchir les accusés alors que les témoins ont été appelés par le bureau du procureur ?
A cette question de Politikafrique.info, la Cour pénale internationale (CPI) est on ne peut plus directe. « Personne ne choisit nos témoins. Le choix des témoins est un aspect confidentiel intrinsèque à notre manière de mener des enquêtes. Pour nous, un témoin est une source de preuves. Nous avons des témoins des faits, des témoins experts, des témoins qui sont des personnes occupant certains postes qui peuvent éclairer sur les structures donc des initiés du système qui sont appelés pour aider non pas l’accusation encore moins la défense, mais la cour. Un témoin qui comparaît, prête serment, et s’engage à dire la vérité. Ce n’est pas une vérité pour faire condamner quelqu’un nécessairement ou pour absoudre quelqu’un de sa responsabilité présumée. Il vient pour éclairer les juges dans leur processus de prise de décision concernant l’affaire dont ils sont saisis », fait savoir Richard Nsanzabaganwa, Conseiller en coopération internationale, Bureau du procureur.
Fadi El Abdallah, le porte-parole de la CPI ne dit pas autre chose. Toutefois, il invite à ne pas se fier aux témoignages car certaines parties se font à huis-clos. « Vous n’avez accès qu’à une seule partie de ce qui se passe devant les juges. Donc vous pouvez certainement penser que ce témoin-ci a été utile ou n’a pas été utile à la crise ivoirienne. Mais, souvenez-vous, il n’y a pas mal d’audience à huis-clos. Il y a également des éléments de preuves qui sont présentés dans les documents qui sont confidentiels ou expurgés. Donc votre vision du contenu d’un témoignage est nécessairement fondée sur une partie de ce témoignage et pas l’intégralité de ce témoignage. Les seules personnes à avoir la vision complète de tous les témoignages sont les juges de la CPI. Ce sera leur rôle de décider si ces témoignages sont crédibles ou pas, et savoir si les témoignages corroborent ou infirment les thèses du bureau du Procureur. Vous pouvez apprécier naturellement ce qu’ils disent, mais souvenez-vous, bien plus souvent, vous n’avez accès qu’à une partie de ce qu’ils sont entrain de dire car l’autre partie est confidentielle parce que à huis-clos », renchérit-il.
Ce lundi 10 avril 2017, face à la presse qu’elle a souhaité rencontrer pour lever toute équivoque sur ses actions, une délégation de la CPI qui séjourne actuellement en Côte d’Ivoire est également revenue sur l’acquittement de Simone Gbagbo l’ex-première dame. Selon le porte-parole de la CPI, cette Cour n’a pas compétence à commenter les décisions de la justice ivoirienne.
« Il n’y a pas de qualification ni de la part du bureau du procureur ni de la part de la CPI en tant qu’institution de juger de la procédure qui a été faite concernant Mme Simone Gbagbo au niveau national. Parce que la question n’est pas posée devant les juges de la CPI et il n’y a pas eu décision sur cela. Il y a eu une décision il y a quelques années, à l’époque les juges avaient dit que les paramètres de l’enquête au niveau national ne correspondent pas au périmètre des faits allégués devant la CPI. Sur cette base, on vu l’affaire continuer à être recevable devant la CPI. Maintenant si la question est soulevée à nouveau devant les juges, dans ce cas, elle sera appréciée par les juges. Ce ne sera pas au bureau du procureur de décider, mais aux juges de la CPI en fonction des éléments de preuve qui seraient apportés le cas échéant s’ils le souhaitent par les autorités ivoiriennes elles-mêmes », a signifié Fadel El Abdallah.
A quand les actions contre les pro-Ouattara ? La délégation de la CPI rassure. « Les enquêtes sur l’autre camp dit Côte d’Ivoire 2 s’intensifient. Elles seront rendues publiques le moment venu par le Bureau du procureur », a déclaré Amady Ba, chef de la section de la coopération internationale, bureau du procureur.
Les échanges ont également porté sur la question de retrait des Etats africains de la CPI. Selon le porte-parole de cette Cour, « la notion de retrait collectif de la CPI n’existe pas à la CPI. C’est une procédure individuelle », indique Fadel El Abdallah. Non sans signifier qu’un seul Etat sur trois (le Burundi) qui avait évoqué son désir de retrait, poursuit sa procédure. Richard Yasseu
Source : rédaction Politikafrique.info