C’est un visage bien pâle que présentait l’armée ivoirienne, au lendemain de la crise postélectorale de 2010. Indiscipline, amateurisme et surtout mutineries à répétition, ont assombri le tableau de cette institution, qui se veut pourtant républicaine. Mais depuis quelques temps, « la grande muette » en Côte d’Ivoire, fait sa mue et reprend des couleurs, sous l’impulsion du ministère de la Défense. Les résultats sont visibles.
Tous les spécialistes sont unanimes. Il faut organiser les états généraux de l’armée afin de rétablir la crise de confiance latente, entre elle et la population. Une profonde refonte qui devait permettre d’instaurer la discipline et surtout le professionnalisme dans ce corps, victime d’un désaveu populaire. Partant, le ministère de la Défense conscient des efforts à déployer en vue de redorer l’image écornée de son institution, a décidé de prendre les choses en main. Et depuis, des initiatives sont prises pour faire de l’armée ivoirienne, une armée moderne.
Amélioration des conditions de vie des soldats
Ce sont des casernes qui ont gardé les stigmates des récentes crises dans le pays, dont a hérité, l’actuel ministre d’Etat, ministre de la Défense, Hamed Bakayoko. Dès sa prise de fonction, il y a de cela quelques mois, l’objectif pour l’ex-ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, était d’améliorer les conditions de vie des soldats ivoiriens. Un plan d’urgence a donc été mis sur pieds. Le ministère de la Défense a d’abord pris en charge la réhabilitation et la construction de tous les réfectoires militaires à travers le pays. A chaque visite dans les casernes, Hamed Bakayoko, n’a jamais lésiné sur les moyens, pour offrir de meilleures conditions de travail à ses collaborateurs.
Hormis les moyens logistiques mis régulièrement à la disposition de ses hommes (environ 91 véhicules dont 7 ambulances), le ministère de la Défense a aussi accompagné en décembre 2017, 991 militaires volontaires, à la retraite. Des chèques leur ont été remis, en vue de les aider à mieux gérer cette nouvelle étape de leur vie. Une restructuration profonde de la grande muette, qui s’étend même aux établissements sanitaires avec environ 45 milliards FCFA dégagés pour l’équipement, la réhabilitation et la construction d’hôpitaux militaires. A ce sujet, le ministre d’État, ministre de la Défense avait déclaré « nous voulons faire en sorte que les hôpitaux militaires de Côte d’Ivoire, aient une renommée internationale, à l’instar de certains grands pays. Nous nous y attelons », avait-il promis lors de la visite de l’hôpital militaire d’Abidjan.
Bouaké, tout reste à faire
Dans la capitale de la région de Gbèkè, la grande caserne d’habitation de la gendarmerie est encore en lambeaux. Après le passage des ex-éléments du Centre de commandement intégré, peu avant la crise postélectorale, ces logements n’ont plus eu de locataires. Seul le bâtiment de l’escadron a connu une réhabilitation. La brigade ville, en face de la cité forestière est demeurée en l’état depuis de longues années. A l’Air France 1, la caserne des sapeurs pompiers militaires ne fait pas honneur à l’armée ivoirienne. Les stigmates de la crise sont encore visibles et le plan de réhabilitation proposé n’a pas connu un début de mise en oeuvre. A Ahougnansou, le camp commando et l’hôpital militaire sont en lutte avec la broussaille. Le ministre Hamed Bakayoko avait visité ces deux sites. Fumeurs de drogue se disputent les espaces avec les amoureux d’air libre pour lieu d’aisance. Sur la route de Brobo, l’Ensoa est aujourd’hui de « caserne » de champs de maïs. Et l’on comprend mieux la tête que fait le Général de corps d’Armée, Ouattara Thomas D’Aquin qui résiste à l’ennemi, seul et abandonné. La troupe ne répond plus. La 3è région militaire a bénéficié d’un portail d’accès, à l’entrée qui donne sur le marché de gros, non loin du stade Yaoundé de Sokoura. Sur ce grand site, les logements d’officiers sont en décrépitude et en ruine. C’est dans ce décor que se nourrissent les mutineries.
La fin des mutineries dans le pays ?
Les ivoiriens avaient oublié le son du crépitement des fusils, depuis la crise de 2012. Et pourtant début janvier 2017, le pays a une fois de plus failli sombrer dans la terreur, suite à des mouvements d’humeurs des militaires, qui réclamaient des primes impayées, au gouvernement ivoirien. Celui-ci s’était empressé de résoudre le problème et ramener le calme.
Le Chef d’État Major Général des armées, Touré Sékou, avait ensuite, présenté les excuses de ses troupes, au Président de la République Alassane Ouattara, pour les mutineries répétées qui ont secoué le pays, lors de la cérémonie de présentation de vœux du nouvel an, le 4 janvier dernier. Un acte fort qui venait marquer une prise de conscience collective d’une armée en pleine reconstruction. Mais avant le grand Chef, les Forces spéciales, encore appelées le « dernier recours », avaient déjà fait leur mea-culpa en novembre 2017, lors de la visite du ministre d’État, ministre de la Défense, Hamed Bakayoko, dans leur caserne d’Adiaké, au Sud-Est de la Côte d’Ivoire. Elles avaient reconnu avoir « fauté une fois par manque de maîtrise de soi. Alors que certaines personnes se complaisent à n’évoquer que ce triste épisode, nous, nous considérons qu’il s’agit d’une crise de croissance de la jeune unité des Forces spéciales que nous sommes. Et elle est désormais, loin derrière nous », avait assuré leur porte-parole, le Lieutenant Colonel Tibé Bi Léopold Toussaint, commandant en second des forces spéciales. Une jeune unité qui se forge petit à petit à la rigueur due à son rang, sans plus jamais basculer sur le rebord. Le ministère de la Défense a même récemment recruté 1000 volontaires, qui intégreront les forces spéciales après une formation de pointe, pour une armée disciplinée.
La recherche du professionnalisme
« Certains éléments ont gardé des habitudes et réflexes de la crise, mais on va s’en sortir » a rassuré Hamed Bakayoko, le 16 janvier dernier, lors de la cérémonie de présentation de vœux du nouvel an, des militaires et personnel du cabinet de ce ministère, à leur ministre Hamed Bakayoko. Une déclaration qui fait suite aux nombreuses initiatives prises dans le sens de la formation des soldats ivoiriens, en vue de les rendre plus professionnels. La Côte d’ivoire a en effet profité de sa proximité avec le Maroc, pour sceller des accords de partenariat militaire. Plusieurs éléments de l’armée de terre ivoirienne y reçoivent une formation militaire accélérée, de 4 mois. Dans ce même élan, la marine nationale, bénéficie régulièrement de formations initiées par la France et les États-Unis, dans le cadre de coopération bilatérale.
A ces pays, vient s’ajouter le Portugal, dont le ministre de la Défense a été reçu par son homologue ivoirien, à Abidjan. L’objectif pour José Alberto Azeredo Lopes, participer à la réforme du système de défense de la Côte d’Ivoire, en apportant l’expertise de son pays dans le domaine de la sécurité maritime. Le ministre d’État, ministre de la Défense Hamed Bakayoko, s’est réjoui de cette coopération et avait souhaité qu’un calendrier soit vite mis en place, pour une exécution rapide.
L’armée ivoirienne est en marche. Un concours d’entrée des Élèves Officiers d’Active (EOA), à l’école des forces armées (EFA) de Zambakro, au titre de l’année 2018, a aussi été lancé depuis quelques jours. L’engouement que suscite ces recrutements militaires auprès des jeunes ivoiriens, est peut être le signe avant coureur d’une confiance retrouvée en leur armée.
Éric Coulibaly
Source : rédaction – Pole Afrique.info