Koné Krouwélé Victorien, directeur de la Promotion des Personnes handicapées s’est exprimé sur la politique de recrutement dérogatoire à la fonction publique mise en place par le gouvernement ivoirien. Il se réjouit des efforts fournis par l’Etat et invite les DRH à réserver aux personnes handicapées beaucoup plus de d’attention.
En quoi consiste votre responsabilité auprès des personnes handicapées ?
Ma responsabilité principale est de favoriser l’insertion sociale des personnes en situation de handicap dans tous les domaines : l’éducation, la formation, l’emploi, la protection juridique et l’assistance. Il faut comprendre aussi qu’il s’agit des droits humains. Ce que nous faisons, c’est de permettre aux personnes en situation de handicap d’avoir les mêmes droits que les personnes valides.
Quelles difficultés rencontrez-vous dans cette fonction ?
Nous sommes confrontés à des difficultés de plusieurs ordres. En tant que structure étatique, nous avons des missions et des attributions qui nous sont confiées par décret. Donc nous devons mettre en œuvre toutes les actions et saisir toutes les opportunités au profit des plus vulnérables notamment les personnes handicapées. Il y a beaucoup de préjugés dans ce domaine, donc il faut faire en sorte que les personnes handicapées bénéficient des mêmes droits que les autres citoyens dans un souci d’égalisation des chances. Cela commence par l’éducation et c’est important. Un citoyen moderne doit être capable de maintenir sa place dans la cité. Il faut pour cela depuis le bas âge, s’assurer que les enfants soient bien éduqués et s’adapter à leur situation pour qu’ils aient les mêmes chances de réussite que les autres personnes. Les difficultés viennent des mentalités encore désuètes. Le changement de comportement nécessite beaucoup de patience.
Justement, l’État de Côte d’Ivoire a mis en place une politique d’insertion des personnes handicapées dans la Fonction publique. Pouvez-vous nous éclairer sur cette politique ?
La politique date de 1997 et satisfait aux dispositions des conventions n° 158 et 159 du BIT relatives à l’emploi notamment l’insertion des personnes handicapées dans le monde du travail. Avant l’adoption de ces deux Conventions, l’État a anticipé pour que les personnes handicapées puissent avoir accès à la Fonction publique. C’est un signal fort fait en direction du secteur privé pour que celui-ci lui emboîte le pas.
Est-il possible d’établir un bilan de cette politique d’insertion par voie de concours dérogatoire des personnes handicapées ?
De 1997 à ce jour, 1506 personnes handicapées ont été intégrées à la Fonction publique. Elles bénéficient d’un emploi décent et stable. Il faut savoir qu’il y a deux voies d’entrée à la Fonction publique : le concours direct et l’intégration à titre exceptionnel par décret du Président de la République. La période de 2015 à 2020 a enregistré le plus gros effectif de personnes recrutées à savoir 858 handicapées. 200 postes budgétaires ont été encore dégagés pour l’année en cours. Je rappelle donc que ce sont au total 1506 personnes handicapées qui ont intégré la Fonction publique par la voie dérogatoire. Ces concours partent du grade D1 (CEPE) jusqu’au grade A4 (Ingénieur, Maîtrise, Doctorat). Ces chiffres montrent que les handicapés ne sont pas rejetés par l’État. Mais en raison de leur nombre et des difficultés liées à leur situation naturelle, des efforts restent à faire. C’est le lieu de remercier le chef de l’État aux pour les efforts consentis en faveur des personnes handicapées.
Les Ivoiriens sont-ils informés de ces concours spéciaux ?
Bien sûr puisque depuis 1997, c’est plus de 1300 candidats qui postulent par an. Aussi, nous avons au sein de notre direction un puissant réseau de communication, nous permettant de faire la couverture en information sur l’étendue du territoire national afin que chaque personne handicapée soit informée à temps. Sont-ils bien traités et bien encadrés dans leur lieu de travail ? Nous continuons de faire de la sensibilisation. Je voudrais inviter les différentes directions des ressources humaines des ministères d’affectation à réserver un bon accueil à ces fonctionnaires. Ce que je voudrais dire aujourd’hui de plus en plus avec le résultat qu’on a après la sensibilisation qu’on a eu à faire, la plupart des Directeurs des Ressources humaines sont disposés à les recevoir de façon favorable. Nous appelons les uns et les autres à plus de responsabilités et de leur faire comprendre que c’est une décision gouvernementale, un décret qui est signé par le Président de la République qui organise et autorise les recrutements.
Il y a eu des acquis dans la prise en charge des handicapés. Mais n’êtes-vous pas en train de donner un peu trop d’espoirs à vos membres ?
Soyons réalistes, il faudrait pour avoir droit à l’opportunité d’insertion avoir un minimum d’éducation. C’est l’éducation qui conditionne tout. Et qu’ils aient accès à l’emploi dans le secteur privé également. Le secteur privé devrait suivre l’exemple de la Fonction publique pour faciliter la politique du Gouvernement, parce que l’État seul ne peut pas embaucher tout le monde. Concernant la question de la parité, qu’en est-il pour les personnes handicapées ? Nous mettons un accent très important au niveau de la parité. Nous faisons des efforts pour qu’à chaque recrutement nous ayons au moins 30% des places réservées aux femmes de manière automatique.
Entretien réalisé par Olivier Dan (correspondant Ouest de la Côte d’Ivoire)